Le Mollah Ahmad Khatémi, représentant du Guide suprême, et imam de la prière du vendredi à Téhéran, a déclaré durant celle du 21 octobre : « Dieu a éteint les manifestations sur les terres d’Islam ! » Malheureusement pour lui, c’était une « fake news » !
Le soulèvement est entré dans sa sixième semaine. Du jamais vu dans l’histoire de la République islamique. Quand les étudiantEs sont attaqués, les lycéenEs prennent la relève, puis surviennent les affrontements nocturnes dans les rues des 150 grandes villes situées dans toutes les provinces du pays. Les manifestantEs sont des gens modestes de tous âges, hommes et femmes, filles et garçons. La grande majorité appartiennent aux « couches moyennes » ayant des revenus modestes, ou sont des précaires et des chômeurEs sans perspectives d’emploi.
« À bas la République islamique, mort au dictateur »
Les étudiantEs jouent un rôle central dans le maintien de la pression, ainsi que dans la continuité du mouvement. Comme souvent dans l’histoire des mouvements démocratiques, les étudiantEs sont en pointe et donnent le « la » des slogans. Toutes les grandes universités du pays sont en ébullition. À l’intérieur et autour des universités, ont lieu chaque jour des affrontements avec les forces de l’ordre et surtout les milices Bassidjis,
Simultanément, « l’Association des enseignantEs » maintient la pression et appelle à continuer la grève des cours, très suivie, surtout dans le Kurdistan. Les enseignantEs se présentent à l’école mais refusent d’enseigner. Cela encourage les lycéenEs à se joindre au mouvement et à continuer à mettre la pression sur les forces de sécurité. Des vidéos montrent des femmes défilant sans foulard dans les rues des grandes villes. Face aux forces de police, elles montrent un courage incroyable et inimaginable il y a encore quelques mois.
Les 15 et 16 octobre, un incendie a eu lieu dans l’infâme prison d’Evin à Téhéran. Les médias d’État ont annoncé qu’une « tentative d’évasion » était en cours, et que « l’unité d’élite de la police avait été envoyée ». Cela a réveillé le triste souvenir du massacre de neuf leaders de la gauche révolutionnaire pendant les dernières années du régime monarchique. Les réactions de la population ont été spectaculaires : des familles, des proches, des gens ordinaires, des jeunes… ont pris le chemin de la prison, provoquant des embouteillage monstres. Cette mobilisation s’est transformée en manifestation hostile au régime, scandant le slogan devenu désormais central : « À bas la République islamique, mort au dictateur ». Au bout d’une nuit de confusion, d’incendie et de bruit d’armes automatiques, le calme est revenu. Aucun des prisonniers politiques connus ne faisait partie des huit morts officiellement déclarés par les forces de sécurité.
Des grèves très politiques
La grève, très politique, dans l’industrie du pétrole, a été réprimée avec plus de 250 arrestations et des brutalités inouïes à l’encontre des grévistes arrêtés.
Bien qu’ayant reçu une « prime surprise » égale à plusieurs mois de salaire, les travailleurEs de la sucrerie de Haft-Tappeh ont fait une grève de solidarité avec le mouvement. Ceux de l’Aciérie nationale de Khouzestan, au sud-ouest de l’Iran, ont annoncé leur intention de faire grève pour réclamer de meilleures conditions de vie, ainsi que pour protester contre la répression en cours des manifestations…
Pendant les cinq dernières années, ces deux usines ont été à la pointe des mouvements revendicatifs, et sont aguerries dans les affrontements avec les forces de sécurité.
Internet étant coupé par intermittence et ayant un débit très lent, les informations recueillies sont parcellaires, et les vérifier prend du temps. Mais une chose est sûre : ces grèves témoignent qu’un début de convergence commence à se produite avec les luttes des lycéenEs, étudiantEs, enseignantEs en grève, qui mènent la vie dure aux forces de sécurité dans les rues de grandes villes.