Publié le Samedi 26 juillet 2025 à 08h00.

La solidarité avec la résistance ukrainienne, un impératif pour la gauche

L’invasion de l’Ukraine par la Russie, déjà responsable de plus d’un million de victimes, n’est pas près de s’arrêter. Réponse à quelques arguments qu’on entend trop souvent et qui cherchent à délégitimer la solidarité.

Car, malgré l’offensive d’un régime néofasciste contre un peuple, nombreuses sont les forces de gauche qui, lorsqu’elles ne s’y opposent pas explicitement, sont réticentes à s’inscrire dans le mouvement de solidarité internationale avec l’Ukraine. 

Relation des impérialistes avec la Russie

Premier argument : l’Ukraine serait « gangrénée par des nazis et des fascistes », ce qui correspond mot pour mot à la propagande déployée par Poutine pour légitimer son invasion. Dans la réalité ukrainienne, les forces apparentées à l’extrême droite ont réalisé 2 % des voix aux dernières élections législatives de 2019. Si l’on ne peut nier la dangerosité des groupes d’extrême droite présents au sein de l’armée, ils représentent une infime minorité des 900 000 agentEs que compte l’armée ukrainienne. Il y a ici une responsabilité décisive de la gauche européenne à montrer un soutien sans ambiguïté. L’extrême droite en Ukraine s’appuie sur ce refus de solidarité de la part de la gauche internationale pour délégitimer les courants progressistes. Une capitulation de l’Ukraine accompagnée de la perte des territoires occupés par l’armée russe conduirait au renforcement et à l’exacerbation du nationalisme promu par l’extrême droite.

Deuxième argument : la ­responsabilité de l’Otan et des impérialismes occidentaux dans le déclenchement de l’invasion. C’est leur « provocation » qui aurait forcé la Russie à réagir. Cette explication omet, d’une part, la nature guerrière et expansionniste de la Russie poutinienne : principale puissance nucléaire de la planète, deuxième exportatrice d’armes au monde, la Russie a été impliquée dans trois autres opérations militaires sanglantes depuis le tout début du mandat de Poutine (Tchétchénie, Géorgie et Syrie). D’autre part, loin de mener une guerre contre la Russie, dans les années précédant l’invasion de 2022, les principaux impérialismes européens (France, Allemagne, Italie et Angleterre) avaient développé une relation économique privilégiée avec la Russie de Poutine, en particulier pour l’accès aux hydrocarbures russes.

Les UkrainienNEs mobiliséEs

Troisième argument : Une guerre interimpéraliste « par procuration » ? Cette perspective réduit les peuples à n’être que des victimes de conflits géopolitiques entre des superpuissances, et leur ôte toute agentivité dans la lutte pour leur propre émancipation. La guerre que mènent les UkrainienNEs contre l’invasion russe est une guerre de résistance populaire. L’armée ukrainienne est à 80 % une armée non professionnelle, soutenue activement par la population, les organisations syndicales1, les collectifs féministes et la gauche socialiste et anti-autoritaire. La paix et la sécurité des populations sont fondamentales pour renforcer les mobilisations contre les politiques néolibérales et le pouvoir de l’oligarchie ukrainienne.

La capitulation de l’Ukraine renforcerait l’extrême droite

Quatrième argument : le soutien militaire à l’Ukraine favoriserait la poursuite et l’extension de la guerre. La doctrine du régime russe est fondée sur un expansionnisme militaire structurel. La résistance ukrainienne est la seule actuellement capable d’enrayer la dynamique guerrière et fasciste au pouvoir en Russie qui se fonde notamment sur le sacrifice de masse de soldats issus des zones périphériques du pays, les plus pauvres et les plus racisées. La volonté de domination de la Russie sur les territoires de l’ex-URSS va de pair avec une mise sous tutelle des aspirations sociales et démocratiques en Russie. Les organisations russes qui incarnent ces aspirations font d’ailleurs face à une répression totale depuis le début de l’invasion. Ce qui légitimerait le réarmement généralisé et favoriserait l’extension de la guerre, c’est au contraire une capitulation de l’Ukraine et la perte de ses territoires, annexés par la violence. Soutenir la résistance ukrainienne, y compris militairement, c’est garantir la possibilité d’une paix juste et durable et favoriser un changement des dynamiques socio-politiques pour les peuples de la région.

Gin et Elias Vola