La seule réponse possible aux risques séparatistes est aujourd’hui de renforcer la confiance populaire dans une Ukraine démocratique et à l’écoute de toutes ses populations. La répression des occupations actuelles, qualifiées de « terroristes », aurait le même effet que les lois votées le 16 janvier dernier par le Parlement ukrainien sous pression de Ianoukovitch (puis retirées) : l’indignation des populations locales.
La demande de référendum suscite la crainte de répétition du scénario vécu en Crimée. Mais l’adhésion des populations de l’Est de l’Ukraine à l’indépendance du pays est beaucoup plus importante qu’en Crimée. Le séparatisme n’est pas (encore) fatal. Il faut s’emparer d’une possible sortie négociée de la crise, mais en l’appuyant sur une vraie consultation populaire : pas des questions piégées et sans débat, ni une constitution rédigée à Moscou – comme celle de Bosnie qui à l’époque fut rédigée à Dayton – ou seulement à Kiev.
D’un point de vue démocratique, la remise en cause de la Constitution présidentielle établie par Ianoukovitch pourrait être soutenue par tout le pays et consolidée par un processus constituant. Cela mettrait ainsi fin à tous les discours sur les prétendus « putschs fascistes » et « anti-russe », ainsi qu’aux actes réels qui ont crédibilisé ces discours de propagandes. Dans un cadre ukrainien unifié, la diversité des histoires, des langues et des liens pourrait alors être reconnue, consolidant l’appartenance à un même État. Les rapports entre régions et avec les pays voisins au plan économique et politique doivent aussi être mis à plat.
Mais il faut refuser un « fédéralisme » des droits sociaux. Les mesures socio-économiques imposées par le FMI, l’injustice sociale et les paradis fiscaux pour les oligarques, concernent bien tout le pays. Et c’est toute la population qui risque d’être affectée par une nouvelle « guerre de l’énergie ». Mais le risque d’éclatement peut venir de l’espoir pour certaines régions que la Russie distribue le gaz à tarifs réduits, cela afin de déstabiliser Kiev, comme l’Union européenne le faisait en son temps en Serbie pour tenter d’isoler Milosevic... Contre toutes les formes de diktats, militaires ou économiques, la défense des droits sociaux et nationaux est la seule chance de l’Ukraine, et cela, seule la population peut l’imposer.
Catherine Samary