Le jour même où était adoptée à l’Assemblée nationale à la quasi unanimité la nouvelle loi antiterroriste, une quarantaine de députés déposaient à leur tour une « proposition de loi tendant à élargir les conditions de dissolution des associations ou groupements de fait tels que les groupes antifas »...
Quinze mois après le meurtre de Clément Méric, alors que son assassin vient d’être mis en liberté, la « droite forte » tente de relancer à l’Assemblée nationale sa campagne de délégitimation du combat antifasciste. On se souvient de l’odieuse campagne menée à l’époque par certains médias et certains politiques, qui entendaient renvoyer dos à dos la victime et son assassin, et tirer un trait d’égalité entre agresseurs et agressés.L’examen de la liste des députés signataires de cette proposition de loi ne laisse planer aucun doute quant à continuité de cette campagne et la volonté de lui donner une issue parlementaire. Conduite par Yannick Moreau, député de Vendée, ancien membre du MPF et aujourd’hui reclassé à l’UMP dans sa tendance « droite forte », on y rencontre également des catholiques intégristes telle la villiériste Véronique Besse, Meyer Habib, conseiller de Netanyahou et vice-président du CRIF, ou Guy Teissier, aujourd’hui UMP, connu par son passé pro Algérie française et ancien membre du groupuscule fasciste Ordre nouveau...On pourrait légitimement être surpris de l’absence des signatures des deux élus frontistes à l’Assemblée nationale. Pourtant, cet « effacement » de pure forme colle parfaitement à la ligne actuelle du parti : se montrer humble, discret, modérer ses propos et ne pas afficher de triomphalisme excessif. Pourquoi monter au créneau quand de braves députés « républicains » peuvent faire le boulot ? La crise interne à l’UMP et la relative autonomie de la « droite forte » est un parfait terrain de « débauchage » d’élus, que son temps venu le FN entend capitaliser.
Tout le mouvement social est concernéLe 28 novembre 2013, les activistes intégristes de l’AGRIF prenaient l’initiative d’une pétition qui « exigeait du gouvernement la dissolution des groupes de l’ultra gauche ». Plus récemment le 31 juillet dernier, Claude Goasguen, député UMP à Paris, ex-dirigeant dans sa jeunesse du groupe fasciste Occident, en appelait à la dissolution du NPA suite à la tenue des deux manifestations de soutien à la Palestine finalement interdite.On aurait tort de prendre à la légère cette volonté, certes encore minoritaire, de la droite et de l’extrême droite de renforcer le dispositif répressif, déjà fort inquiétant, dont dispose l’appareil d’État. Un dispositif largement renforcé récemment par la loi antiterroriste présentée par le gouvernement et votée comme un seul homme, y compris par les élus du Front de gauche à l’Assemblée nationale.En demandant d’« élargir les conditions de dissolution des associations ou groupements de fait », on s’attaque à des milliers de collectifs, de comités, à tous les cadres non institutionnels indispensables à l’émancipation et à l’auto-organisation des luttes et des résistances.Les militantEs du NPA seront en première ligne pour la défense des libertés démocratiques et ne renonceront jamais au droit inaliénable de manifester. La première réponse à ces intimidations visant à faire taire et à criminaliser le mouvement antifasciste est de préparer avec détermination la riposte dans la rue à la tenue du congrès du F Haine à Lyon le 30 novembre prochain. No pasaran !
Alain Pojolat