Le « problème de la dette » est de retour avec son cortège d’idées zombies. « Chaque français doit à sa banque 50 000 euros », « nous consommons et dépensons trop », « nous ne produisons et ne travaillons pas assez ». Bref nous sommes endettéEs car nous vivons au-dessus de nos moyens. Tel est en substance le discours de François Bayrou.
C’est l’heure de passer à la caisse, fini la bamboche. Après les 50 milliards de dépenses en moins du budget 2025, 40 milliards de baisses supplémentaires, au moins, sont envisagées pour 2026. Et ça va continuer, le gouvernement table sur une réduction d’environ 100 milliards des dépenses entre 2027 et 2029.
Un État qui se prive de recettes
L’argument de la dette est une manière simple et efficace de faire acquiescer aux politiques d’austérité car il fait appel au « bon sens » : dépenser plus que ce que l’on gagne est un problème et fait prendre le risque, à terme, de la spirale du surendettement. Mais rappelons qu’un État, contrairement à un individu, n’est pas « mortel ». De ce point de vue, c’est un très bon client pour les créanciers car il remboursera toujours ses emprunts. Et l’État, contrairement à un individu, choisit le niveau de ses revenus en fixant le montant des impôts et du taux des cotisations sociales. Le problème c’est que depuis 2017 (et depuis les années 1980 en fait) les gouvernements successifs ont fait le choix de massivement se priver de recettes… d’où un déficit public qui a été financé par l’endettement, dont le remboursement ne pose pas vraiment problème.
Un transfert massif de ressources vers le capital
Et les cris alarmistes sur la « dérive des comptes publics » sous les gouvernements Attal-Borne (pour des recettes inférieures de 40 milliards aux prévisions du fait de la faiblesse de la croissance) participent d’un écran de fumée : la question du poids de la dette et de la réduction du déficit public est une arme de la guerre sociale. En effet, les politiques d’austérité organisent un transfert massif d’argent public vers le capital à travers les aides diverses aux entreprises. Celles-ci s’élevaient en 2022 à 175 milliards d’euros dont 75 milliards d’exonération de cotisations sociales ! Et les dépenses de l’armée augmenteront, elles, de 3 milliards d’euros en 2026… Plus globalement, les politiques d’austérité visent à réaffirmer l’ordre capitaliste en s’assurant que celleux qui n’ont que leur force de travail pour vivre n’aient bien que ça en les rendant plus dépendantEs du marché : réduction des dépenses prenant en charge la satisfaction des besoins sociaux (éducation, santé, logement), casse des retraites, de l’assurance chômage, etc.
Nos besoins avant leurs profits
Le mouvement syndical devrait être vent debout contre les attaques de Bayrou contre le salariat. D’autant que la contestation de ce budget offre un terreau unificateur pour notre camp social : financement des besoins sociaux par l’impôt, hausse des salaires et des cotisations, etc. Il est urgent de construire un rapport de forces qui permette d’imposer d’autres choix.
William Daunora