Le premier tour confirme ce que l’on sentait venir : une grande instabilité politique, une poussée à droite de l’échiquier politique, et une gauche délabrée.
Le Parti socialiste et Les Républicains sont expulsés du second tour. C’est une situation inédite, le signe de l’usure des partis qui ont géré les affaires de la bourgeoisie, fait passer les politiques antisociales. Par ailleurs, Macron, probable futur vainqueur, a recueilli les voix de seulement 18 % des inscrits. Propulsé au second tour de l’élection par les miracles combinés du « vote utile » et les scandales entourant Fillon, la légitimité de son pouvoir sera extrêmement réduite…
Cette élection met en lumière le caractère particulièrement antidémocratique de la 5e République. Alors que le parti sortant est laminé, que la droite est décrédibilisée par les affaires, ce système parvient tout de même à faire émerger un Président qui pourra utiliser le scrutin majoritaire pour obtenir une majorité à l’Assemblée. Et, comme par hasard, ce candidat rassemble toutes les orientations de la classe dominante : sponsor de l’Union européenne, précarité débridée, lien avec les milieux financiers...
La résistible ascension de l’extrême droite
L’autre événement est l’ampleur du score du FN. Il recueille 7,6 millions de voix, soit 1,3 de plus qu’en 2012... et près de 3 millions de plus qu’en 2002 ! Dans la confusion actuelle, il parvient à se présenter comme un « parti social », certains électeurs allant voter pour lui parce qu’il serait pour la retraite à 60 ans.
Pour nous, le FN est un danger mortel pour les libertés démocratiques, il est profondément antisocial et raciste. Le Pen est pronostiquée à 35 %, voire 40 %, au second tour, bien loin des 18 % de son père en 2002. Le pire reste sans doute la faiblesse des réactions dans la rue, y compris parmi la jeunesse.
Une gauche dévastée
À l’opposé, la gauche sort laminée de ce scrutin. Elle pèse moins de 30 %, soit moins de 10 millions de voix. Si les électeurs ont voulu sanctionner la politique de Hollande, le résultat n’est pas un déplacement vers la gauche : Mélenchon a réalisé une campagne très chauvine (« patriotique », dirait-il) et peu radicale, et les scores de l’extrême gauche sont extrêmement faibles.
Les partis traditionnels issus du mouvement ouvrier, le PS et surtout le PCF, qui regroupaient des dizaines de milliers de militantEs, sont quasiment morts… sans être remplacés par quelque chose de plus combatifs. C’est le reflet du recul du mouvement ouvrier, du rapport de forces.
Notre campagne, un écho plus important que nos résultats
Les scores du NPA et de LO sont très faibles, reflétant la difficulté actuelle pour les idées anticapitalistes. Beaucoup d’électeurs ont voté Mélenchon... tout en affirmant être en accord avec nos positions ! Cela même sans parler de tous ceux qui n’ont pas le droit de vote.
Nous avons au moins été utiles pour affaiblir Le Pen et Fillon, en particulier lors du grand débat du 4 avril. Des centaines de milliers de personnes ont apprécié notre discours de rupture avec le système. Nous avons aussi contribué à populariser la mobilisation en Guyane… où nous avons recueilli 5,24 % des voix ! Nous nous sommes tournés largement vers l’extérieur et avons commencé à reconstruire le NPA comme organisation militante. Mais la route reste encore longue !
Ces prochains jours...
La prochaine étape, ce sont les manifestations du 1er Mai contre le FN et les politiques libérales. Macron a déjà annoncé qu’il va gouverner par ordonnances pour casser encore plus le code du travail : il faut donc préparer dès maintenant la mobilisation du monde du travail contre sa politique.
Les politiques d’austérité, comme celles défendues par Macron, sont la cause de la montée du FN. Nous comprenons que, dimanche 7 mai, des électeurs vont utiliser le bulletin Macron pour battre Le Pen dans les urnes, mais nous ne considérons pas que l’ex-ministre de Hollande est un rempart à l’extrême droite. Pour faire reculer durablement le FN et ses idées, la mobilisation collective reste la seule solution.
Et après, un outil pour reconstruire
Plus largement, nous devons reconstruire les syndicats, les collectifs de mobilisation, les associations du mouvement ouvrier, qui permettent de retisser les solidarités, de développer la conscience de classe et les mobilisations dans l’unité.
Il faut aussi tracer la perspective d’un parti pour les exploitéEs. Nous ne sommes pas en dehors de l’inévitable discussion sur la recomposition à gauche. À toutes celles et tous ceux qui ont refusé de voter ou à qui on refuse le droit de vote, à celles et ceux qui ont voté Mélenchon en pensant faire un vote de rupture, à celles et ceux qui ont voté LO, nous tenons à dire que plus que jamais, nous avons besoin d’un parti qui représente nos intérêts, un outil pour nos luttes quotidiennes, pour en finir avec le système capitaliste, pour porter le projet d’une société débarrassée de l’exploitation et de toutes les oppressions.
Dans l’immédiat, pour nous, cela passe bien entendu par la construction du NPA et l’organisation de nouveaux militantEs. Pour lutter et changer le monde.
Antoine Larrache