Le second tour des cantonales a confirmé les caractéristiques du premier. L’abstention est restée à un très haut niveau. L’UMP a subi un magistral revers et l’impact du FN s’est renforcé. Quant au PS, il n’a pu crier victoire tant son résultat est en demi-teinte.Nouvel élément qui renforce les inquiétudes quant au poids de l’extrême droite dans la vie politique en France, son succès du premier tour et la présence de 402 de ses candidats au second tour, n’a pas provoqué de sursaut « civique » de type anti-fasciste.
Pire, si le FN n’a pas autant d’élus qu’il l’espérait1, il enregistre une progression moyenne de 10 % entre les deux tours dans les cantons concernés. Il a attiré une partie des voix de droite du premier tour lorsqu’il était opposé à un candidat de gauche mais, même si c’est dans une moindre mesure, il a réussi aussi à capter les voix de gauche du premier tour dans les cas du duel FN-UMP. Les sondages pour les présidentielles, où l’abstention sera à coup sûr moindre, donnent des résultats supérieurs encore pour Marine Le Pen, ce qui souligne que l’extrême droite dispose de réserves potentielles. Il faut prendre cette menace au sérieux, tout en gardant raison. Le FN progresse, il cherche à provoquer une vaste recomposition politique à droite, mais il n’est fort heureusement pas en position de prendre le pouvoir seul.La Sarkozye s’enfonce dans la crise. Non seulement les résultats de l’UMP sont très mauvais, mais les réserves qu’il prétendait avoir chez les abstentionnistes n’existent pas. Les voix qu’il avait siphonnées à gauche et au FN sont retournées au bercail et le doute s’installe sur les capacités de Sarkozy à refaire le coup de 2007 en 2012. Résultat, les divisions apparaissent. Des voix se font entendre pour préparer une alliance avec l’extrême droite dédiabolisée alors que d’autres préconisent un changement de candidat.Et à gauche ?Le PS bénéficie de la situation et le nombre de ses élus progresse. Mais il souffre lui aussi d’un gros déficit de crédibilité. La gestion de ses départements n’en fait pas une base de résistance contre la politique d’austérité du gouvernement. Il ne parvient pas vraiment à incarner l’espoir de changement et à mobiliser les abstentionnistes. Quand il est opposé au Front de gauche ou à Europe Écologie, ses résultats ne sont pas bons. Le PCF l’a par exemple emporté contre le PS à Aubervilliers et contre les Verts à Saint-Denis. C’est le signe de la recherche d’une alternative à gauche du PS.Le Front de gauche obtient 118 élus à l’issue du second tour. C’est un bon score dans le contexte, mais cela ne représente pas une percée. Les candidats de ce parti n’ont pas réussi à traduire dans les urnes la puissance de la contestation sociale en mobilisant les abstentionnistes. Si l’on compare de cantonales à cantonales, on peut constater que le PCF parvient à enrayer son déclin2. En 1979, il obtenait 22,46 % des voix, soit 558 élus. En 2004 il obtenait 7,79 % et 108 élus soit cinq de moins qu’en 2011. L’alliance du Front de gauche lui est utile. Pas de quoi tout de même justifier les déclarations enflammées de Mélenchon.62,3 % d’électeurs se sont abstenu ou ont voté blanc et nul. C’est l’autre signe de la colère sociale contre un système en faillite. La facture de la crise du système capitaliste continue de dégrader les conditions de vie et de travail des salariés. Crise sociale et crise écologique s’ajoutent pour discréditer le système et ceux qui le gèrent. Tout l’enjeu – immense – de la période est de transformer le rejet individuel en force collective pour organiser la rupture. Cela passe par la mobilisation contre les réformes libérales et contre le nucléaire. Et cela passe aussi par l’effort permanent d’organisation et de rassemblement des forces anticapitalistes. C’est la seule solution pour enrayer la poussée frontiste.
Fred Borras1. Le FN obtient deux élus alors que Louis Alliot, bras droit de Le Pen, en espérait entre 10 et 50.2. Sur les 118 élus que compte le Front de gauche, 113 sont des élus PCF.