Une macronie fracturée, LR et Horizons qui s’abstiennent, c’est finalement le soutien du Parti socialiste qui sauve Lecornu et fait adopter la partie recettes de son PLFSS d’austérité. Retour sur un naufrage !
Au départ il y avait Bloquons tout, la mobilisation intersyndicale et le débat sur la taxe Zucman, pour faire payer les milliardaires et s’opposer aux 45 milliards de cure d’austérité, que Bayrou puis Lecornu veulent imposer à l’État et à la Sécurité sociale. Mais pour la gauche libérale, pas question de faire tomber le gouvernement. Avec un gouvernement minoritaire dans le pays et au Parlement, un socle commun fracturé par les ambitions présidentielles, le PS espérait que son offre de sauvetage du soldat Lecornu serait payée en retour par quelques concessions. Las…
La ligne rose
La ligne rouge du PS, c’était paraît-il la taxe Zucman et l’abrogation de la réforme des retraites. Pour sauver coûte que coûte Lecornu, la ligne rose sera un simple décalage de 3 mois de l’application de la réforme des retraites. Une retraite à 64 ans que le PS devra voter dans l’amendement de décalage, et qu’il faudra en plus payer par un gel des pensions de retraite. Car tout doit se faire à austérité constante ! Pas question pour Lecornu donc de toucher au doublement des franchises médicales, qui pourront toujours passer par ordonnances. Pas question de toucher à la taxe supplémentaire de 1 milliard sur les complémentaires santé, dont les tarifs vont augmenter d’autant. Le PS a même voté cette taxe, qu’il avait pourtant rejetée en première lecture. Faire payer les malades, aggraver le manque de personnels et les fermetures de lits, voilà le PLFSS de Lecornu que le PS a sauvé !
Cette séquence parlementaire aura eu raison de la mobilisation, faute de perspective de confrontation. Le camp syndical est fracturé, la CFDT sort de l’intersyndicale, et lorgne comme le PS du côté de la retraite à points. Un point dont le montant varie chaque année en fonction des résultats économiques. La porte ouverte à la capitalisation et aux fonds de pension, pour compléter une retraite de misère !
La voix de la solidarité
Mais cette séquence parlementaire brouille aussi les cartes sur le financement de la Sécu. Le PS a imposé un débat autour de la CSG, une création de Rocard pour alléger le « coût du travail », en grande partie payée par les particuliers. Nous voulons une augmentation des cotisations, payées par les patrons, pour la santé, les retraites. Un exemple : le déficit de la branche vieillesse retraite n’est que de 5,6 milliards. Une augmentation de 1 % de cotisation patronale rapporte 4,9 milliards ! Pâle copie de la taxe Zucman, qui ponctionnait 15 à 25 milliards sur 1 800 milliardaires, la hausse de la CSG, présentée comme une grande victoire par le PS, aurait par exemple touché les PEL. 25 % des particuliers possèdent un PEL (Plan d’épargne logement), avec un dépôt moyen de 25 000 euros. Loin d’être le refuge des grandes fortunes et des milliardaires ! Le gouvernement sortira finalement de son chapeau un amendement de hausse a minima de la CSG, pour emporter l’accord de la droite et du PS.
Sauver le gouvernement Lecornu, c’est le meilleur moyen d’ouvrir la voie au Rassemblement national. Le censurer au Parlement et le bloquer unitairement dans la rue, en portant haut et fort des exigences de solidarité, voilà qui déplace la colère et l’espoir à gauche. C’est le seul moyen de gagner sur nos revendications et de bloquer la résistible ascension du RN.
Frank Prouhet