En 2024, 5,1 millions de personnes avaient participé au Dry January, ou Défi de janvier en version française, dont un tiers des jeunes entre 18 et 24 ans.
Cette année, 60 % des personnes interrogées souhaiteraient essayer le mois sans alcool, selon un sondage BVA. Un succès qui ne se dément pas, malgré la farouche opposition du lobby de l’alcool et de ses relais politiques.
Un gouvernement dans la main du lobby de l’alcool
La composition pro-alcool du gouvernement Bayrou pourrait prêter à sourire si le sujet n’était pas aussi sérieux. Dans l’ordre d’apparition, Catherine Vautrin ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, qui a dû précipitamment changer l’année dernière sa bannière Facebook qui faisait la promotion du vin de Champagne ; Yannick Neuder, nouveau ministre de la Santé, médecin, qui s’est opposé comme rapporteur du budget de la Sécu à l’augmentation des taxes sur l’alcool, auteur de cette envolée : « Je ne crois pas que les jeunes s’alcoolisent avec du châteauneuf-du-pape, […] soutenons nos viticulteurs ! » Nathalie Delattre, ministre chargée du Tourisme, jusqu’à il y a peu vice-présidente de l’Anev (Association nationale des élus de la vigne et du vin), a déclaré « depuis que je suis ministre, je n’ai pas changé. Je continue fièrement à porter les couleurs de la viticulture, […] à porter haut et fort le fait que je suis contre le “Dry January” ».
Les profits contre la santé publique
Au-delà des phrases polémique, il s’agit pour les lobbies de l’alcool d’éviter toute augmentation des taxes sur l’alcool dans le cadre du PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) afin de préserver leurs profits. En France, l’alcool représente 700 000 emplois directs et indirects et un chiffre d’affaires proche de 40 milliards d’euros.
Ces lobbies, viticoles, brassicoles, industriels, sont très actifs au Parlement et trouvent de nombreux relais, y compris à gauche. Ainsi le député LFI du Nord Ugo Bernalicis qui s’est opposé à l’augmentation des taxes sur les bières fortes… au nom de la défense des brasseries artisanales. Les divers groupes d’études « Vigne, vin et œnologie » ou « Vigne et vin », dont sont exclues les associations intervenant en addictologie et les professionnellEs de santé, relaient à l’Assemblée et au Sénat les éléments de langage des alcooliers : « tradition », « terroir » et bien sûr « culture ». Une certaine vision de la France, assez peu inclusive, pour ne pas dire réactionnaire.
Face au succès grandissant du Dry January, le lobby de l’alcool tente d’allumer des contre-feux, à l’instar de la campagne « Consommer modérément, profiter pleinement », lancée par la bien nommée association Prévention et Modération, qui regroupe… les producteurs de bières et spiritueux. Dans la même veine, les alcooliers essaient de faire émerger un Damp (humide) January plutôt que le Dry (sec).
En attendant, contrairement au Mois sans tabac par exemple, il n’y a toujours pas de soutien des pouvoirs publics à cette campagne de santé qui invite celles et ceux qui consomment de l’alcool à faire le point sur leur consommation et leur rapport à l’alcool. Une campagne qui mérite d’être défendue, y compris dans les milieux militants.
Alex Bachman