L’OMC discutera les 23 et 24 février de la levée des droits de propriété intellectuelle sur les vaccins et traitements covid. Sur Mediapart, une tribune a été publiée exigeant le levée des brevets, à l’initiative du collectif « Brevets sur les vaccins anti-covid, stop : réquisition ! ».
Les responsables de la CGT, de la FSU, de Solidaires, d’Oxfam, d’Attac, de la LDH, de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, Willy Rozenbaum, Patrick Pelloux, Christian Prudhomme ou Samuel Alizon pour la France, Fatima Hassan d’Afrique du Sud, le colombien Roman Vega Romero, coordinateur monde de People’s Health Movement, ou PSI, la Fédération internationale des syndicats de services publics, plus de 130 personnalités du monde associatif, syndical ou scientifique, interpellent Emmanuel Macron : « Nous affirmons que vaccins, traitements, dispositifs médicaux et tests anti-covid sont des biens communs de l’humanité. » Nous publions ci-dessous des extraits de la tribune.
« Les seuls bénéficiaires des brevets sont les actionnaires »
« Monsieur le président, vous avez inauguré votre présidence de l’Union européenne par un refus opposé à la demande légitime de lever les brevets, portée par l’Inde et l’Afrique du Sud. […] Le monopole de production, conféré pour 20 ans par les brevets, est la principale cause des prix trop élevés et de la pénurie de vaccins et de traitements. Alors qu’ils ont été obtenus grâce à de gigantesques investissements publics ! Les seuls bénéficiaires des brevets sont les actionnaires des entreprises pharmaceutiques, qui engrangent 1 000 dollars de revenus par seconde […]. En décembre 2021, comme le souligne Oxfam, la France et l’Union européenne ont vacciné plus de 70 % de leur population, contre seulement 3 % de vaccinéEs dans les pays à faible revenu. Devant ces chiffres sans appel, certains parlent d’apartheid vaccinal. […]
Le mécanisme de solidarité Covax a été mis en avant pour repousser la nécessité de lever les brevets. Son objectif de vacciner seulement 30 % des pays pauvres bien insuffisant, et les dons de doses bien en-dessous des quantités nécessaires pour vacciner le monde. Triste réalité, sur les 1,8 milliard de dons de vaccins promis par l’ensemble des pays riches, moins d’un milliard ont été réellement livrés fin 2021, certains très proches de la date de péremption ! Ce qui fait que les pays pauvres n’ont reçu que 7,1 doses pour 100 habitantEs, alors que les pays riches bénéficiaient de 155 doses pour 100 habitantEs, selon le Financial Times fin 2021. Covax, "une promesse non tenue" pouvait titrer Médecins sans frontières !
« Une campagne de vaccination volontaire, universelle et gratuite »
La levée des brevets s’impose face à une pandémie qui fait officiellement en moyenne près de 10 000 morts par jour dans le monde, en réalité probablement trois fois plus selon l’OMS. Sans parler des Covid longs, des retards de soins pour d’autres pathologies, de la prévention négligée, des systèmes de santé malmenés par des années d’austérité, partout au bord du gouffre, de l’aggravation des inégalités. […] Médecins sans frontières et Human Rights Watch recensent plus de 100 sites en capacité de produire rapidement des vaccins à ARN-m. Pour fabriquer 8 milliards de doses d’un vaccin équivalent au Pfizer avec 1 386 salariéEs répartis sur cinq sites, 9,43 milliards de dollars suffiraient selon les calculs des chercheurs de l’Imperial College, en lien avec l’association Public Citizen. 9,43 milliards de dollars, à comparer à plus de 30 milliards de dollars donnés aux laboratoires pharmaceutiques pour vacciner seulement la partie la plus riche de la population mondiale. De quoi vacciner à deux doses la partie de l’humanité privée de vaccins !
Si les vaccins restent efficaces contre les formes graves, évitent de saturer les réanimations, leur efficacité contre la circulation du virus diminue fortement. Pour éviter une forte mortalité et une large circulation virale qui pourrait favoriser l’émergence de nouveaux variants, il faut à l’échelle mondiale une campagne de vaccination volontaire, universelle et gratuite, associée à de puissantes mesures de réduction des risques de contamination, bâties avec les populations sur le mode préconisé par l’OMS du "convaincre plus que de contraindre". M. Macron, nous n’osons croire que toutes vos déclarations sur l’urgence de la vaccination ne valent que pour la France. […] Il est temps pour vous de tourner le dos aux exigences de l’industrie pharmaceutique, et de reconnaitre enfin l’urgence de la levée des brevets, face au terrible bilan humain du Covid-19. »