L’Assemblée nationale doit adopter le projet de loi sur la mobilité des fonctionnaires, une attaque en règle contre leurs statuts, dans le cadre d’un vaste plan de restructuration de la fonction publique.
Le gouvernement profite de l’été pour faire passer ses mauvais coups. Il a attendu la session extraordinaire de l’Assemblée nationale, en ce début de juillet, pour faire voter par les députés la loi sur la mobilité des fonctionnaires, qui avait déjà été adoptée par le Sénat il y a un an.
Selon Eric Woerth, resté ministre du Budget et de la « réforme de l’Etat », qui a présenté le projet, ce serait « permettre aux fonctionnaires de s’épanouir tout au long de leur carrière ». Pure hypocrisie, alors qu’il est évident que cette nouvelle loi s’inscrit dans la réforme de l’Etat et de la révision générale des politiques publiques (RGPP), qui se traduira notamment, en 2010, par la suppression de 34000 postes.
La loi prévoit en premier lieu de faciliter la « mobilité » des fonctionnaires, leur passage d’un corps et d’une fonction publique (d’Etat, territoriale ou hospitalière) à l’autre. Le deuxième volet du texte est relatif à « l’accompagnement des changements d’emploi, notamment dans le cadre des restructurations d’administrations de l’Etat », comme l’a lui-même souligné le rapporteur UMP Jacques Alain Benisti. Le fonctionnaire dont le poste sera supprimé aura « la chance » de se voir proposé trois emplois, qui tiendraient compte de son « projet d’évolution professionnelle » et de sa « situation familiale ».
Enfin, parmi les dispositions les plus importantes, l’administration sera autorisée à recruter des intérimaires pour remplacer des fonctionnaires absents, ce que le gouvernement a le cynisme de présenter comme un net progrès par rapport à la précarité déjà existante dans la fonction publique – l’emploi de vacataires ou de contractuels – qu’il n’a fait qu’accentuer lui-même.
L’ensemble de la loi est une attaque frontale contre la fonction publique et ses personnels. Il s’inscrit dans la restructuration de l’administration que Sarkozy avait annoncée dans son discours de Nantes, le 19 septembre 2007. Il met à la disposition de l’Etat les instruments nécessaires pour engager le plan social le plus important qui existe à l’heure actuelle. Car, bien évidemment, facilités de « mobilité » et obligation pour un fonctionnaire dont le poste aura été supprimé d’accepter un des trois postes qu’on lui proposera se traduiront, en cas de refus, par un licenciement pur et simple.
Toutes ces raisons de rejeter la loi ont été énoncées tant par les syndicats, dont des délégations ont manifesté devant l’Assemblée le 1er juillet, que par les députés de l’opposition. Mais ces protestations sont restées bien confidentielles et très tardives et, comme le gouvernement s’est plu à le répéter, le projet de loi, même s’il n’a pas fait accord jusqu’au bout, a résulté d’une concertation à laquelle tous ont participé.
Cela explique que peu de salariés de la fonction publique, aujourd’hui, ont pris la mesure de l’ampleur de ces attaques. Beaucoup jugent encore impossible que l’Etat puisse licencier, et massivement, des fonctionnaires. La loi est certes votée mais le combat contre sa mise en œuvre et pour son retrait restent possible. D’autant que les dispositions qu’elle prévoit risquent d’avoir leur traduction concrète dans les mois qui viennent. A petites doses certainement d’abord, à travers peut-être des cas plus ou moins isolés mais qui en révèleront la nature. Ce combat, il sera crucial de l’inscrire dans un plan pour une contre-offensive globale.
Galia Trépère