La mise en liquidation judiciaire de l’entreprise survenue le 21 mai est une nouvelle étape d’un processus qui a déjà abouti à la suppression de 700 emplois. En octobre 1997, l’équipementier automobile Heuliez, qui employait alors 1 300 salariés, avait été mis pour la première fois en procédure judiciaire de sauvegarde. Un premier redressement judiciaire en avril 2009 avait abouti à un plan social avec 400 licenciements. Et, de mois en mois, de plan social en plan social, les effectifs salariés ont fondu pour atteindre aujourd’hui 600 salariés. Ce qui se passe chez Heuliez est une leçon de choses, concentrée des pratiques des fonds d’investissement, de la politique gouvernementale et des impasses illusoires du Parti socialiste. Tous se sont penchés, au cours de ces dernières années, sur le sort d’Heuliez, faisant tous miroiter de fausses solutions pour aboutir au fiasco d’aujourd’hui. À qui fera-t-on croire que le gouvernement français et le fonds stratégique d’investissement, qu’il finance avec PSA et Renault, seraient incapables de trouver sur la planète, entre les propositions indienne, française, allemande ou turque, un repreneur non-escroc ? C’est bien une question de volonté politique : le gouvernement veut encore plus de suppressions d’emplois chez Heuliez. Le PS et Ségolène Royal, présidente de la région Poitou-Charentes, se sont aussi intéressés à l’entreprise. Alors que le gouvernement jouait au poker menteur avec une promesse de 10 millions d’euros non encore fournis à ce jour, la région PS a, elle, versé une subvention de 5 millions d’euros sans moyen de contrôle sur son utilisation. S’il fallait une preuve que le véhicule électrique n’est pas aujourd’hui dans la réalité d’un marché fondé sur la rentabilité financière, Heuliez est là pour l’apporter. En décembre 2009, Ségolène Royal déclarait : « La reprise de cette entreprise et de plus de 600 salariés par le groupe Bernard Krief Consulting est un soulagement pour tous. De nouvelles perspectives industrielles sur le site de Cerizay vont pouvoir être mises en œuvre. La région fait pleinement confiance aux dirigeants de BKC, et particulièrement à Louis Petiet, son PDG. » C’était celui-là même qui se révéla un mois plus tard être un repreneur voyou. En voulant faire croire qu’un tour du monde des repreneurs serait plus efficace que la propre lutte des travailleurs, gouvernement et PS n’ont rien réglé et ont contribué à démoraliser les salariés.D’autres chemins sont possibles. Plutôt que des subventions à fonds perdus, la réquisition sous contrôle des travailleurs ouvre une perspective de lutte pour garantir emploi et outil de travail. Plutôt que les mirages du marché pour les véhicules électriques, une entreprise placée sous les contrôle de ses salariés discuterait partenariat avec les instances publiques. Les donneurs d’ordre d’Heuliez sont clairement identifiés, à savoir PSA, Renault mais aussi Opel qui, il y a un an, a supprimé ses commandes : c’est à eux qu’il faut demander des comptes. Jean-Claude Bernard