Chronique de la lutte des places. Pour le monde du travail, peu importe le nom qui sortira du chapeau le 3 juillet pour remplacer Laurence Parisot à la présidence du Medef. Ce sera de toute manière un patron décidé à poursuivre l’offensive pour dézinguer les droits des salariéEs.Il y a cinq candidats, tous masculins (mais on ne va pas regretter Parisot pour autant), plus ou moins gros requins mais tous aux dents bien affûtées. D’après la presse patronale qui scrute les nuances, il y aurait le projet d’un « Medef de combat » contre le gouvernement et les syndicats incarné par Pierre Gattaz qui explique « Le Medef doit dès juillet proposer au gouvernement un triple choc de confiance, de fiscalité et de compétitivité », affirmant être un partisan du « dialogue social de terrain » face à Bernasconi qui déclare « Il faut les emmener avec nous plutôt que de les braquer », et assure avoir « acquis la confiance des syndicats réformistes » pour une suite à l'accord sur la sécurisation de l'emploi.
Porte-parole de leur classeÀ travers leurs campagnes respectives pour gagner les voix des structures patronales (fédérations patronales et Medef territoriaux), les candidats jouent sur leurs spécificités. Pour Gattaz (l’héritier de son père qui a été président du CNPF, l’ancêtre du Medef…), c’est son poids dans de grosses fédérations (l’Union des industries minières et métallurgiques), tandis que Geoffroy Roux de Bézieux, un de ses challengers, président d’une société de télécommunication, joue au porte-parole des petites, voire très petites, entreprises . Celui-ci déclare : « Je demanderai à l'Urssaf la mise en place d'un moratoire pour donner une bouffée d'air aux TPE en difficultés. Cette mesure a déjà été appliquée avec efficacité lors de la crise de 2008. Je redoute que les difficultés de trésorerie que connaissent les TPE conduisent à la rentrée à une vague de dépôts de bilan ».Une chose est sûre, cette campagne aura pour effet de renforcer l’unité et la détermination du Medef pour défendre les intérêts de l’ensemble de la classe patronale qui aura fait entendre ses besoins particuliers à l’ensemble de ses candidats. Ainsi, Gattaz a réussi à rallier le soutien des deux plus puissantes fédérations patronales après l’UIMM, la fédération des assurances et plus récemment celle des banques. Pour lui, il s’agit de montrer qu’il n’y a pas d’antagonisme entre l’industrie et les services, et au-delà préparer l’offensive contre la protection sociale avec ceux qui rêvent de se partager le magot : les assureurs et les banquiers. D’autre part, Gattaz doit donner des gages et rassurer les patrons qui trouvent que les accords signés par l’UIMM avec les syndicats coûtent trop cher (les Plans de sauvegarde de l’emploi comme celui de PSA par exemple). Bien sûr, la nouvelle loi transposant l’ANI pourra les en dispenser. Mais ils en réclament encore plus, ce qui explique la « combativité » de Gattaz comme la détermination de Bernasconi à approfondir l’ANI.Ils annoncent déjà le calendrier et leurs objectifs. Reste à voir le dispositif pour le mettre en œuvre. Mais il n’y a pas de suspens… à part les capacités du monde du travail à leur résister.
Cathy Billard