Publié le Mercredi 10 février 2016 à 14h53.

Montre-nous que tu le mérites, ton RSA !

Le Conseil départemental du haut-Rhin a voté vendredi une mesure qui a soulevé l'indignation. Il s'agit d'exiger des bénéficiaires du RSA qu'ils/elles fournissent en échange sept heures hebdomadaires de « bénévolat »...

De petits rappels s'imposent :

• « RSA » signifie « revenu de solidarité active ». Il s'agit d'une allocation de survie attribuée à celles et ceux qui n'ont pas d'autres ressources. Oui, de survie, car le montant ne permet de vivre qu'au prix d'acrobaties économiques et « porte-monnesques » et de privations. Ce n'est ni la belle vie ni un privilège.

• « Bénévolat » (de bene : « bien » et vol : « vouloir », le suffixe « at » indiquant un statut). Ce mot signifie « Activité volontaire accomplie sans obligation et gratuitement ». Par conséquent, du « bénévolat » « imposé », cherchez l'erreur, ce n'est pas du bénévolat. Contresens cynique. C'est un travail imposé. Au Moyen-Age, un travail dû (sans rémunération) à celui qui détient le pouvoir, on appelait ça les « corvées ». De là au travail forcé, il n'y a qu'un pas...

Les personnes qui touchent le RSA préféreraient avoir un vrai emploi pour un véritable salaire digne. Leur imposer ces heures de travail non rémunéré est indigne, humiliant, stigmatisant. Imagine-t-on comment ils/elles seront appelés et traités dans les structures où on les enverra travailler à l’œil ? Derrière cette mesure se trouve l'idée persistante que les allocations en tout genre, c'est de la charité que l'on accorde à des fainéantEs et que l'on peut bien exiger quelque chose en contrepartie. C'est ce qu'ils (les élus du Haut-Rhin rapporteurs de la mesure) appellent « un juste équilibre entre droits et devoirs »… Qu'est-ce que c'est que cette morale du 19e siècle ?

En outre, le « travail bénévole » qui serait accompli auprès de collectivités, associations ou maisons de retraite est un vrai travail socialement utile et qui doit donc correspondre à des emplois rémunérés et encadrés par le code du travail (qui existe encore, malgré tout).

On peut certes espérer que le Préfet, le Conseil d’État ou une quelconque juridiction fera annuler cette mesure, mais sous ce gouvernement qui n'est pas de gauche, vous l'aurez remarqué, on ne peut compter que sur la solidarité et la mobilisation pour interdire de telles dispositions contraires aux droits élémentaires, et au droit tout court.

Brigitte Boulier