Publié le Mercredi 26 juin 2019 à 10h00.

Réforme de l’assurance chômage  : les chômeurEs vont payer !

Après les 800 millions de la convention 2017, ce sont 3,4 milliards d’euros d’économies qui vont être faites, dont 80 % seront réalisés sur le dos des chômeurEs.

Alors qu’aujourd’hui il « suffit » de justifier d’une activité salariée de 4 mois au cours des 28 derniers mois (pour les moins de 53 ans), il faudra, au 1er novembre prochain, avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers. Cette seule mesure exclurait, selon l’UNEDIC, entre 250 000 et 300 000 sans-emploi de l’assurance chômage. Alors que sur 5,6 millions d’inscritEs à Pôle emploi, seulEs 43 % étaient indemnisés en 2017, contre 54 % en 2003.

Révision des règles de calcul

La révision des règles de calcul des indemnités va entrainer une baisse sensible de l’allocation mensuelle. Au lieu d’être calculées à partir des jours travaillés, elles le seront, à partir d’avril 2020, sur le revenu mensuel moyen du travail. Pour quelqu’un qui aurait travaillé 2 semaines dans le mois, cela aboutit à une diminution de moitié de son allocation. Alors que les gouvernements successifs n’avaient cessé d’encourager les contrats courts, le discours actuel consiste à stigmatiser les chômeurEs qui profiteraient du système en « optimisant » les règles de cumul activité-allocation. Les chômeurEs se retrouveront dans la situation de devoir accepter n’importe quel emploi afin d’éviter les sévères sanctions définies en décembre dernier. Une économie espérée de 690 millions d’ici à 2021.

Les droits rechargeables visés

Créés en 2014, les droits rechargeables permettent à des chômeurEs indemnisés reprenant une activité durant leur période de chômage de prolonger leurs droits lorsque ces derniers sont épuisés, sous réserve qu’ils et elles justifient de 150 heures travaillées. Le seuil minimum de rechargement sera ramené à 6 mois, au lieu d’un mois aujourd’hui. Ces droits rechargeables ne le seront plus puisque la durée de travail revient à celle permettant d’ouvrir des droits…

Le retour de la dégressivité

Une dégressivité de 10 % sera instaurée pour les salariéEs les mieux payés (+ de 4 500 euros brut mensuels). Ils se verront appliquer une dégressivité de 30 % au bout du 7e mois de chômage, l’allocation ne pouvant pas être inférieure à 2 261 euros net.

Selon le ministère du Travail, plus le revenu de remplacement est élevé, plus la période de chômage serait longue, omettant de mentionner que 76 % des allocataires touchant les indemnités maximales ont plus de 50 ans et rencontrent des difficultés particulières à retrouver un emploi du fait de leur âge. Une dégressivité mise en œuvre entre 1992 et 1996 dont l’INSEE avait montré en 2001 qu’elle « ralentit le retour à l’emploi » et dont l’OFCE a souligné qu’elle était inefficace. Nul doute que la dégressivité imposée à ce public a priori privilégié sera ensuite généralisée à l’ensemble des chômeurEs.

Bonus-malus

Promesse du candidat Macron, le « bonus-malus » est censé responsabiliser les entreprises abusant des contrats courts et lutter contre la précarité. Son rejet par le patronat avait entre autres conduit à l’échec des négociations de la convention d’assurance chômage.  

Après de nombreux débats, seuls 7 secteurs (sur 38) seront mis à contribution, a minima, à compter du 1er janvier 2020. Le bâtiment et le médico-social seront exonérés. Il ne concernera que les entreprises de plus de 11 salariéEs avec une modulation des cotisations entre 3 à 5 %, soit + 0,95 % au maximum pour les entreprises pénalisées.

De « nouveaux droits » sous conditions

TouTEs les salariéEs ayant 5 ans d’ancienneté pourront démissionner et prétendre à l’assurance chômage sous réserve d’avoir un projet professionnel. Les indépendants se verront allouer une allocation mensuelle de 800 euros pendant 6 mois à la condition d’avoir généré un revenu minimum de 10 000 euros par an sur les deux dernières années avant liquidation judiciaire. Ces « nouveaux droits » devraient concerner 60 000 personnes tout au plus.

1 000 agents « supplémentaires » à Pôle emploi pour 3 ans

Dans le cadre de cette réforme, « plus de moyens » sont annoncés pour Pôle emploi avec 1 000 embauches, soit environ 1 par agence Pôle emploi, mais pour des CDD de 3 ans. Après une baisse de 297 équivalents temps-plein en 2018, puis de 800 cette année ! Sans compter le transfert d’effectifs vers les plateformes de contrôle de recherche d’emploi (600 à ce jour, 1 000 à terme). Les manœuvres pour baisser artificiellement le nombre de chômeurEs, les multiples réorganisations effectuées en vue de gagner en productivité continuent à justifier le manque de moyens attribués au service public.

Ces mesures, ajoutées à la suppression des cotisations salariales (remplacées par une hausse de la CSG – impôt à la main de l’exécutif – dont une partie vient alimenter les caisses de l’Unedic) et au décret du 30 décembre 2018 renforçant les sanctions viennent compléter l’ensemble du dispositif de casse de la protection sociale et la chasse aux chômeurEs.  

Correspondant