La réforme des retraites a été dénoncée, à justice titre, pour son caractère antisocial. Et la méthode gouvernementale pour la faire passer, comme antidémocratique. Un aspect a été largement passé sous silence : son caractère raciste. Un amendement, proposé par la droite LR et approuvé par le gouvernement, attaque encore un peu plus les misérables droits dont « bénéficient » les migrantEs retraités, souvent appelés Chibanis.
Recrutés dans leur pays d’origine, souvent les pays du Maghreb, dans les années 1960 pour satisfaire un besoin de main-d’œuvre bon marché dans la métropole impérialiste, lié à l’essor économique de l’époque, ils ont été assignés aux tâches les plus dures et les moins bien payées.
Exil et pension de retraite dérisoire
Depuis des décennies, ces dernierEs subissent la brutale inhumanité et l’injustice raciste de l’État qui refuse à ces vieux travailleurs, souvent malades, de percevoir dans leur pays d’origine l’ASPA (Allocation de solidarité pour personnes âgées), la maigre allocation que beaucoup d’entre eux touchent faute de pouvoir justifier de droits à la retraite malgré des années de travail. Premières victimes des crises successives, souvent au chômage, ils ont été souvent la proie de patrons sans scrupules qui les ont surexploités et ne les ont pas déclarés. À la fin de leur vie professionnelle, ils perçoivent des retraites dérisoires et ne survivent que grâce aux aides sociales comme l’ASPA.
Obligation de résidence en France augmentée de 3 mois
Pour percevoir cette allocation, qui pour beaucoup est une aide financière précieuse pour la famille restée au pays, ils étaient obligés, jusqu’à présent, de vivre au moins six mois loin de leurs proches pour toucher ce qui leur revient de droit. Et c’est à ce droit que s’attaque cet amendement qui devrait entrer en vigueur le 1er septembre et qui les obligerait à résider au moins 9 mois en France sous peine de perdre leur droit à l’ASPA.
En théorie, cette mesure devrait s’appliquer à tous les retraitéEs allocataires de l’ASPA mais ce sont bien les chibanis qui sont les premières cibles de contrôles administratifs permanents, abusifs et tatillons, toujours à charge, et sans possibilité de contestation. Et, à la moindre occasion, suppression de l’ASPA et même réclamations de remboursement d’« indus » qui aggravent leurs conditions matérielles d’existence. Ils sont déjà les premières victimes de la chasse aux pauvres sous couvert du mantra gouvernemental de « lutte contre la fraude ». La réforme des retraites leur rendrait la vie impossible. Cette nouvelle aggravation n’est qu’un moyen de supprimer purement et simplement leurs droits et d’attendre cyniquement qu’ils meurent !
Après l’émoi suscité par le film Les Tirailleurs, Macron s’est fendu d’un geste purement démagogique et cynique vis-à-vis des quelques anciens combattants sénégalais qui sont encore vivants, à l’occasion de la réception d’une délégation à l’Élysée le 14 avril. Au seuil de leur mort, l’État leur a accordé — généreusement ! — que le versement de leur allocation ne soit plus soumis à la condition de résidence en France. Évidemment rien pour les autres assignés à résidence, condamnés par l’État impérialiste à vieillir dans le dénuement et à mourir en France, loin des leurs.