Répondre aux besoins sociaux et écologiques exige un changement de cap radical, passant par des mesures énergiques de rupture avec la logique du profit capitaliste. Les listes et candidats présentés par le NPA inscrivent leur action au niveau des régions dans le cadre de leur programme national, qui met en avant les objectifs suivants:
- Interdiction des licenciements ;
- Augmentation de 300 euros netdes salaires, des pensions de retraite, des minima sociaux ; pas un revenu inférieur à 1500 euros net ; allocation d’autonomie pour les jeunes ;
- Réduction du temps de travail, sans perte de salaire, sans flexibilité ni annualisation, avec embauches correspondantes ;
- Création de centaines de milliers d’emplois publics, dans l’éducation, la santé, l’énergie, la petite enfance, le quatrième âge ; arrêt des privatisations et développement des services publics ;
- Monopole de la banque et du crédit à travers un grand service public bancaire ;
- Monopole de l’énergie dans le cadre d’un grand service public qui donne la priorité aux énergies renouvelables et tourne la page du nucléaire ; transports en commun publics gratuits ;
- Soutien à une agriculture paysanne, nourricière et de proximité, respectant à la fois le climat, l’environnement, la biodiversité et les salariés. Tolérance zéro pour les OGM et les trusts de l’agro-business ;
- Fin des politiques sécuritaires, discriminatoires et racistes ; régularisation de tous les sans-papiers ; droit de vote pour tous les résidents à toutes les élections ;
- égalité salariale entre les hommes et les femmes ; défense du droit à l’IVG, avortement et contraception libres et gratuits pour toutes ; égalité des droits et dans les faits entre les hétéros et les personnes LGBTI ;
- Solidarité avec les peuples en lutte contre l’impérialisme : retrait des troupes françaises d’Afghanistan et d’Afrique ; soutien au peuple palestinien, abrogation des accords de coopération – notamment ceux passés par les conseils régionaux – avec l’État d’Israël.
Pour être appliqué, ce programme exigera une mobilisation populaire capable de transcender les restrictions qu’imposent les actuels cadres institutionnels. C’est d’autant plus vrai dans le cas des régions que celles-ci ont des pouvoirs et des capacités d’action limitées, y compris par rapport à d’autres collectivités territoriales. Il reste que les conseils régionaux ont les moyens de mettre en œuvre une série de mesures améliorant la situation des classes populaires, et d’en faire autant de points d’appui qui aideront à résister à la droite et au patronat, puis à engager une contre-offensive. En ce sens, nous luttons pour imposer les transformations suivantes.
Défendre, reconquérir et étendre les services publics
Pour la grande majorité de leurs actions, les régions agissent comme des « donneurs d’ordres » faisant appel à des organismes et entreprises privés comme publics. Les exécutifs d’union de la gauche financent très largement les lycées privés, ainsi que les centres d’apprentissage contrôlés par les syndicats patronaux. De même offrent-ils au privé des marchés juteux dans des domaines tels que la formation professionnelle, les services scolaires (cantines, informatique…) ou encore le transport par autocars. Il faut mettre un terme à ces dérives libérales, en se guidant selon le principe simple : l’argent public doit aller exclusivement au service public.
Fonds publics à l’école publique. Les con-seils régionaux financent les lycées privés même quand ce n’est pas légalement obligatoire, comme c’est le cas avec les dépenses d’investissement (réparations, entretien…). Nous proposons de supprimer immédiatement ces subventions, ce qui permettra d’accroître l’effort en faveur des lycées publics. Quant à la dotation de fonctionnement des établissements privés, nous nous appuierons sur la mobilisation laïque des personnels de l’enseignement et de la population pour y mettre également un terme.
Les services que plusieurs conseils régionaux ont privatisés doivent sans tarder être réintégrés dans le secteur public. Le fait, notamment, de soustraire la restauration scolaire à la loi du profit permettra de garantir une meilleure qualité d’alimentation, comme de développer avec les producteurs locaux de l’agriculture vivrière des partenariats qui seront utiles à toute la société.
Défense de l’enseignement professionnel public. Avec ses contre-réformes adaptant les formations aux besoins immédiats du patronat, régionalisant les diplômes et excluant un nombre croissant de jeunes du service public d’éducation, le gouvernement saccage l’enseignement professionnel. Au lieu de résister à cette politique, les conseils régionaux l’accompagnent, à travers un soutien massif au développement de l’apprentissage, mode de formation de prédilection du patronat.
Nous proposons d’inverser radicalement le cours de cette politique. D’affirmer et de garantir dans les faits la priorité à l’enseignement professionnel public par rapport à l’apprentissage. Avec les budgets qui seront ainsi dégagés, de contribuer à donner aux LEP les moyens de fonctionner correctement, afin d’être en condition d’offrir à tous les jeunes une formation de qualité, adaptée à leurs besoins.
Créer un véritable service public de la formation professionnelle. Nous proposons de construire dans les régions – face à la défaillance actuelle de l’État – de véritables services publics régionaux, qui auront vocation à se coordonner dans une perspective de généralisation à l’échelle nationale.
Cela implique de renoncer aux procédures d’appels d’offres ouverts au privé ; d’attribuer les missions de formation et d’insertion professionnelle avant tout selon des critères de qualité adaptée aux besoins ; de les confier exclusivement à des organismes publics, principalement les associations pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et les groupements d’établissements publics d’enseignement (Greta) ; de définir la carte des formations en fonction des vœux des élèves et non plus des besoins patronaux.
Pour le secteur de l’apprentissage, cela veut dire mener une politique d’intégration des centres de formation d’apprentis (CFA) dans le nouveau service public régional qui se verra créé. À cette fin, les régions engageront une négociation avec l’Éducation nationale et, chaque fois que nécessaire, proposeront aux personnels des CFA de rejoindre la fonction publique territoriale, en prenant les dispositions nécessaires à leur accueil en son sein.
Dans tous les domaines d’intérêt collectif – transports, eau, énergie… priorité absolue au service public. Il faut refuser l’ouverture à la concurrence et revenir sur les contrats dits de « délégation de service public », à travers lesquels des activités d’intérêt collectif sont livrées à des groupes capitalistes qui gèrent ces pactoles au détriment de la qualité du service et de l’entretien des infrastructures, tout en imposant des tarifs prohibitifs. Les activités concernées doivent être réintégrées dans le secteur public.
Une autre politique peut et doit être menée dans de nombreux domaines si l’on veut vraiment servir de « bouclier » contre la libéralisation et la privatisation. Les régions doivent mettre en œuvre la « clause de compétence générale » (que le gouvernement veut supprimer) pour répondre aux besoins sociaux insuffisamment ou pas du tout pris en compte par l’État, parce qu’elles ne disposent pas d’une autre solution, de très nombreuses communes petites et moyennes sont aujourd’hui, contre leur gré, dépendantes des grands groupes de la gestion de l’eau (Veolia, Saur, Lyonnaise des eaux/Suez…) qui réalisent sur leur dos des profits considérables. Afin d’offrir à toutes les populations une solution alternative publique, nous proposons de mettre en place des régies régionales de l’eau, que toutes les communes qui le souhaiteront pourront rejoindre.
Avec les transports gratuits, un plan radical pour l’environnement
Un tel plan doit intégrer de nombreux terrains d’action. Le retour au public des services privatisés en fait partie, puisque c’est une fois libérés des impératifs du profit capitaliste qu’ils pourront être organisés dans un but de satisfaction écologique des besoins sociaux. De même, les régions peuvent fixer des critères écologiques pour la construction et rénovation des infrastructures qu’elles financent, et soutenir le fret ferroviaire face au tout-camion.
En cessant de subventionner les entreprises de l’agroalimentaire, en réservant les aides régionales aux petits producteurs et en les conditionnant au respect de critères écologiques, en se dotant d’une politique afin de contrecarrer la spéculation foncière, les régions disposent également de moyens de contrer les effets de l’agriculture productiviste qui pollue et épuise les sols comme les ressources hydrauliques.
Mais c’est dans le domaine des transports que l’action la plus efficace peut être menée. Il n’y aura aucune réduction suffisante des gaz à effets de serre, aucune action réelle contre le changement climatique, sans une diminution drastique de la circulation automobile. Or la seule alternative à l’automobile est le développement des transports collectifs. C’est pourquoi nous proposons d’instaurer partout la gratuité des transports collectifs régionaux.
Impératif écologique, cette mesure a aussi un contenu social évident : défense de l’environnement et mise en application du droit à se déplacer se rejoignent. Contrairement aux idées reçues, elle n’a rien d’irréalisable. Les recettes de billetterie ne couvrent qu’entre 17 % et 30 % des coûts, le reste provenant pour l’essentiel de subventions publiques. Une partie importante, si ce n’est la totalité de ces montants, pourrait être couverte en généralisant à l’échelle nationale la contribution transport des entreprises, en la portant à 100 % du trajet domicile-travail des salariés, ainsi qu’en taxant les entreprises (grandes surfaces, promoteurs immobiliers…) qui bénéficient du service public des transports sans y contribuer.
La gratuité devra naturellement aller de pair avec une politique d’amélioration, développement et extension du service public des transports. L’abandon de projets (lignes à grande vitesse, aéroports, métro automatique « Grand Huit » en Île-de-France…) démesurés, dépourvus d’utilité sociale, conçus uniquement pour la concurrence capitaliste et la rentabilité financière, permettra dans une large mesure de dégager les moyens nécessaires.
La gratuité des transports débouchera aussi sur un développement de l’emploi public, socialement utile. Les embauches nécessaires s’accompagneront de la reconversion des agents qui étaient chargés des contrôles dans des missions d’accueil, d’information et de sécurité au service des usagers.
Aux côtés des salariés et de leurs luttes, soutenir les travailleurs, pas le patronat
Nous mettrons fin au scandale des multiples aides et subventions au patronat aujourd’hui délivrées par les conseils régionaux. Nous récupérerons les aides et subventions versées sous la mandature précédente aux entreprises qui ont licencié. Nous supprimerons immédiatement toutes les aides directes au patronat et réaffecterons les sommes correspondantes dans trois actions nouvelles :
m Constitution de fonds régionaux publics d’investissement, qui seront mis à la disposition des coopératives ouvrières et des producteurs candidats à la reprise autogérée, par les travailleurs eux-mêmes, de sites fermés ou démantelés par les capitalistes.
m Mise en place d’offices publics régionaux de conseil juridique aux salariés. Les ressources de ces offices seront placées gratuitement à la disposition des organisations syndicales de travailleurs et des représentants des salariés aux comités d’entreprise, pour instruire au civil comme au pénal, ainsi que devant les chambres prud’homales, les dossiers d’infractions aux lois commises par les patrons. La région se portera systématiquement partie civile, aux côtés des représentants des salariés, quand il aura été constaté que de telles infractions portent également préjudice à la collectivité territoriale. Ces offices serviront au soutien des luttes des sans-papiers, en particulier (puisque les lycées sont une compétence des régions) à la défense des lycéens sans papiers menacés d’expulsion.
m Création de comités régionaux de solidarité avec les travailleurs et les secteurs populaires en lutte. Ces fonds serviront en particulier à couvrir financièrement les pertes subies pour fait de grève contre des plans de licenciements ou de fermeture d’entreprise, et à offrir gratuitement des prestations en nature : repas, prise en charge des enfants et personnes dépendantes des grévistes, etc.
Plus généralement, les mesures qui ne bénéficient qu’aux capitalistes propriétaires de grandes et moyennes entreprises seront supprimées. Les autres types d’aides seront réservés, sous des conditions de respect de critères sociaux et écologiques, aux entreprises du secteur coopératif et de l’économie solidaire, ainsi qu’aux petits producteurs et aux entrepreneurs individuels.
Une véritable politique de logement social. Un tel changement de cap permettra de dégager dans chaque région des dizaines de millions d’euros. Ces sommes seront réaffectées aux actions de service public menées dans le domaine du logement qui, s’il n’est pas une des principales prérogatives dévolues aux régions, se situe au premier plan des urgences sociales.
Contre ce qui se fait actuellement, les financements dans ce domaine seront réservées exclusivement au logement étudiant (de la responsabilité des régions) et aux véritables logements sociaux, qui manquent dramatiquement : ceux de catégorie PLA-I (plafond de ressources de 1 200 euros pour une personne seule) et PLUS (plafond à 2200 euros).
Répondre aux revendications des agents des régions. Défendre les intérêts des salariés passe d’abord par assurer des conditions correctes à celles et ceux qui sont employés par les conseils régionaux eux-mêmes : les agents des services de la région et les personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS – personnels non enseignants des lycées) que l’État a récemment « décentralisés ».
Cela implique d’abord de mettre un terme à la précarité scandaleuse que subissent de nombreux travailleurs, en procédant à l’intégration statutaire immédiate de tous les employés non titulaires. Plus généralement, cela veut dire les revendications portées par leurs organisations syndicales, au niveau des salaires (traitement et primes, ratios d’avancement à 100 %) comme des conditions de travail et des statuts.
Engager une rupture démocratique
Pour que ces différentes mesures puissent être appliquées, la participation et la mobilisation des salariés et de la population sera indispensable. Il faudra en effet se confronter à la fois aux intérêts patronaux, à la politique du gouvernement et aux tentatives de blocage de l’appareil d’État représenté par le préfet.
Cette mobilisation sera d’autant plus nécessaire que les pouvoirs et capacités d’action des régions, qui étaient déjà limités, risquent de se voir encore réduits par les contre-réformes gouvernementales : suppression de la taxe professionnelle qui constituait leur principale ressource autonome, projet de réforme des collectivités territoriales visant notamment à supprimer la « compétence générale » permettant aux collectivités territoriales d’intervenir dans d’autres domaines que ceux que leur attribue la loi.
Afin de mettre un terme au clientélisme, nous nous prononçons pour la suppression du cumul des mandats des conseillers régionaux, pour la limitation du nombre des mandats des élus (pas plus de deux mandats dans la fonction, pas d’élus à vie). Pour les associations, nous proposons un accès public aux dossiers dès le travail en commission. Nous sommes pour la limitation du pouvoir et des prérogatives du président de région, le refus de la personnalisation. Pour que les réunions des commissions permanentes (qui votent notamment des subventions) soient publiques. Pour que les élus rendent compte publiquement de leur action dans des bilans de mandature qui soient au minimum annuels.
Les cadres technocratiques d’une gestion institutionnelle souvent complexe sont un obstacle à l’implication des salariés et des couches populaires dans les choix politiques des régions. Cette situation, s’ajoutant à l’empilement des compétences entre les différents niveaux des collectivités territoriales (communes, départements, régions), explique pourquoi l’action quotidienne des conseils régionaux intéresse relativement peu les populations.
Il faut donc éclairer les enjeux des décisions et développer un pouvoir de contrôle effectif des salariés et de la population, au plus près des dossiers. À cette fin nous proposons de placer les services publics régionaux, existants et à créer, ainsi que les actions de service public développées dans le cadre des régions, sous le contrôle des usagers ainsi que des personnels concernés.
Ainsi, toute décision concernant l’enseignement secondaire devrait être soumise à l’approbation d’un conseil participatif, constitué dans ce secteur par des représentants élus des parents d’élèves et des lycéens, ainsi que des personnels enseignants et non enseignants, et disposerait également de pouvoirs de proposition. De même pour les transports, où un conseil de ce type réunirait des représentants des usagers et des organisations syndicales de salariés, ainsi que pour les autres domaines d’action des régions.
Quant aux grands choix, notamment d’investissement, qu’ils relèvent d’ailleurs de décisions du conseil régional ou qu’ils n’en dépendent pas mais affectent la vie de la population (comme c’est le cas, par exemple, du « Grand Paris » sarkozyste), ils devraient être soumis au suffrage populaire, à travers des référendums pouvant être convoqués soit par le conseil régional lui-même, soit à la demande de 5 % des électeurs inscrits.
L’instauration de telles procédures démocratiques, outre qu’elle permettrait aux populations de mieux s’approprier les choix des régions et d’y jouer un rôle effectif, serait aussi un outil de mobilisation contre toutes les décisions et projets qui portent atteinte à leurs droits et à leurs conditions d’existence.
*. Ces pages sont extraites, sous une forme réduite et légèrement modifiée, de la brochure nationale publiée par le NPA pour ces élections.