Dans un contexte européen de progression générale des racismes1,la stigmatisation des musulmans, qui s’accommode parfaitement du « choc des civilisations » des élites néo-conservatrices, s’impose comme la forme la plus répandue de racisme au sein des extrêmes droites continentales. Depuis 2009, chaque élection en Europe souligne que les droites populistes et les extrêmes droites progressent. La majorité de ces organisations, inspirée par certains intellectuels issus de la Nouvelle Droite (Guillaume Faye, Pierre Vial, Robert Steuckers…), s’appuie sur les « communautarismes » pour mieux les dénoncer et ainsi créer les conditions favorables à leur projet de développement séparé des populations à l’échelle planétaire.
Pour cela, ils focalisent leur discours sur la peur de l’islam, défini comme une idéologie conquérante, une culture ennemie, pour mieux cristalliser un « communautarisme blanc » autour de la culture « chrétienne » ou « indo-européenne », selon les courants.
Les partis populistes, autoritaires et xénophobes (le plus souvent nationaux-libéraux, régionalistes et identitaires) préconisent la (re)construction d’une identité ethnicisée. Ils parlent d’échec de « l’intégration », dénoncent la société multiculturelle et exploitent le thème de l’immigration.
L’influence grandissante de ces droites nationales et radicales oblige les partis majoritaires à faire des choix : soit les intégrer dans des gouvernements de coalition (avec le risque de les légitimer un peu plus), soit les exclure de l’exercice du pouvoir tout en reprenant leur discours2 pour se faire réélire.
La position de l’extrême droite en Europe
En Scandinavie, le Danskfolkeparti a été capable de faire tomber le gouvernement danois et d’imposer une législation restrictive sur l’immigration et le droit d’asile. Le Parti du Progrès (FrP) est la deuxième force politique en Norvège. Les Démocrates de Suède font leur entrée au Parlement.
Dans de nombreux pays d’Europe occidentale, à l’exception notable de l’Italie, les organisations d’extrême droite sont exclues de l’exercice du pouvoir. Néanmoins, que ce soit aux Pays-Bas, avec le Parti de la liberté de Geert Wilders (il assimile le Coran à « Mein Kampf »), en Belgique avec le Vlaams-Belang ou en Italie avec la Ligue du Nord, ce discours raciste sur « l’islamisation » de la société s’impose.
En Allemagne, l’extrême droite organise, depuis deux ans, de nombreuses initiatives sur la thématique anti-islam. Le mouvement allemand Pro Köln (composante du réseau des Villes contre l’islamisation) se veut le fer de lance de la protestation contre le projet de construction d’une mosquée à Cologne. Fin mars 2010, la manifestation de Duisburg (dans la Rhur) a été suivie d’un « congrès européen contre l’islamisation » à Gelsenkirchen.
En Suisse, la votation du 29 novembre 2009 (initié par l’UDC et inspiré de la réglementation « anti-minarets » de deux Länder autrichiens) a interdit la construction de nouveaux lieux de culte musulmans.
En Angleterre, l’EDL (English Defence League, fondée en 2009 et liée au mouvement hooligan) organise plusieurs manifestations contre « l’islam radical » (le British National Party se dit étranger à ces initiatives, mais cherche, en réalité, à contrôler le mouvement).
En France, la politique du gouvernement Sarkozy-Besson-Hortefeux laisse peu d’espace à sa droite après l’adoption des lois anti-voile et anti-burqa. Néanmoins, la marge du FN (NDP, PDF, MNR) présente deux listes «anti-minarets» en Lorraine et en Franche-Comté aux élections régionales de mars 2010.
Au même moment, le FN mène prioritairement campagne sur les questions économiques et sociales (l’immigration étant la cause des difficultés), mais aussi sur l’identité nationale. Ainsi, en Rhône-Alpes et Paca, l’affiche « non à l’islamisme » du FNJ (du « mariniste » David Rachline), à destination d’un électorat très ciblé, sous prétexte de s’attaquer à l’islam politique, pointe du doigt les populations musulmanes, discréditant ainsi les tentatives lepénistes de rallier les « patriotes musulmans ». Des infléchissements internes (ouvrant la voie au soutien de la LDJ dans les prochains mois) sont-ils en cours au FN, sous la pression de sa périphérie (les Identitaires font de ce discours leur marque de fabrique3) ?
Les extrêmes droites, qui ne veulent nullement changer le système, ont besoin de trouver des boucs émissaires pour rallier à leurs idées. Elles reformulent leurs discours selon le contexte et jouent sur les peurs, accentuées par une crise économique sans précédent, à laquelle s’ajoute la crise du projet d’Europe libérale (UE), pour se développer et prospérer jusqu’à frapper dans un certain nombre de pays aux portes du pouvoir.
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Denis Boulègue, Gabriel Gérard, Alexandre Timbaud
1. Consulter le rapport téléchargeable de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance 2009. Il souligne la progression simultanée des racismes anti-tsiganes, anti-noirs, anti-juifs et anti-musulmans.
2. Voir les propos d’Angela Merkel sur l’échec du multiculturalisme. Tout est à nous ! hebdo 74, p. 5