Publié le Samedi 26 avril 2025 à 11h00.

37 secondes, de Anne Landois et Sophie Kovess-Brun

Minisérie de 6 épisodes avec Nina Meurisse et Mathieu Demy. Disponible sur arte.tv jusqu’au 08 juillet 2025.

Au début des années 2000, l’histoire du Bugaled Breizh a défrayé la chronique. C’est que 37 secondes, pour voir disparaître corps et biens un chalutier de cette taille, ce n’est pas commun. Et puis, comme souvent, après une enquête, des polémiques, le silence s’est installé...

Le secret

La première qualité de cette série est donc bel et bien de faire ressortir cette affaire. À nouveau, on en parle. Que l’on soit peu ou pas informé sur ce drame, la série opère une première mise à jour. Cinq marins ont péri en mer, et les circonstances de l’accident ne sont toujours pas établies ! La série ne cache rien des différentes hypothèses plus ou moins crédibles qui ont circulé à l’époque. Pas dans les gazettes, non. Dans les prétoires ! Et si l’on peut percevoir des invraisemblances dans le scénario de la fiction signée par les autrices, aucune n’atteint l’absurdité de certains scénarios échafaudés par les autorités maritimes, civiles et militaires qui, à l’époque, ont tout fait pour faire prendre à la population des vessies pour des lanternes. 

La dispute

Très controversée, la série fait parler ! Une fiction adossée à une histoire vraie aussi ­sensible, c’est un peu casse-gueule, mais les autrices assument tout à fait le grand écart entre d’un côté la relation scrupuleuse des faits et de l’interprétation qui en a été livrée dans la presse et les tribunaux, et de l’autre une totale liberté de création concernant les personnages et l’aspect romanesque de l’histoire qu’ils vivent ensemble.

Or c’est là que le bât blesse. Si certaines critiques sont peu recevables — l’armateur du bateau, le vrai, se plaint dans la presse d’être décrit comme un méchant patron, mais l’on sait que c’est souvent le lot de pauvres patrons mal jugés par le bas peuple ! — il faut bien admettre que nombre de personnages sont taillés à la serpe et manquent de profondeur, voire de crédibilité, et que le jeu des acteurs sonne parfois un peu faux. Reste que la prestation de Nina Meurisse en héroïne de la classe ouvrière attachante et naturellement charismatique tient, à elle seule, la série !

Un coup d’avance ?

Une journaliste de la PQR (presse quotidienne régionale), interrogée par son journal, n’hésite pas à dire que si elle était parisienne, elle aurait adoré cette série... Il semble raisonnable de recommander aux lecteurEs de l’Anticapitaliste, quels que soient leur lieu de résidence ou leur appartenance, de tâcher de se faire une opinion par elleux-mêmes ! À gagner, outre des images presque banales de paysages extraordinaires — un exploit ! — de la pointe de la Bretagne, les éléments pour comprendre ce qu’il en a été du Bugaled Breizh, de ses marins et ce qui pourrait se passer si le dossier venait, plus de vingt ans après, à être rouvert à la suite de la diffusion de la série !

Vincent Gibelin