Le titre de l’ouvrage (interprétation de L’Iliade et l’Odyssée) n’est pas sans rappeler le « Zadig et Voltaire » de Frédéric Lefebvre, d’ailleurs brièvement mentionné en introduction. Le tollé soulevé par cette marque évidente d’absence de référence culturelle sert de point de départ à une réflexion sur le rôle et l’importance de la culture générale, une idée très française selon l’auteur. Après avoir exposé les lacunes d’un tel modèle (élitiste, raciste, machiste…), il pourfend de façon très convaincante toutes les idées relativistes et postmodernes qui tapissent aujourd’hui l’air du temps. Rédacteur par ailleurs d’un Petit cours d’autodéfense intellectuelle1, Normand Baillargeon se montre persuasif sur l’enjeu que représente une culture générale en termes politiques, en particulier comme condition de la conversation démocratique.
De ce point de vue, il pointe le problème que pose l’absence de culture générale scientifique face aux grand enjeux qui se posent à nous en termes de santé comme de transition énergétique : « Refuser d’armer chacun pour comprendre ces enjeux, c’est refuser de faire bénéficier la conversation démocratique de certaines des lumières qui lui sont indispensables si elle ne veut pas sombrer dans la propagande et que la science procure de manière exemplaire et inégalée : par exemple de cette leçon d’humilité épistémique et de faillibilisme qu’elle donne ainsi que ce souci des faits et de la vérification indépendante. »
Malgré la référence alléchante en introduction au projet anarcho-syndicaliste d’éducation, l’auteur traite au final de cet aspect trop rapidement. Sa référence à Fernand Pelloutier, en conclusion, nous invite à ouvrir la discussion sur une culture garante d’émancipation et donc à lire, en complément, un autre ouvrage fondamental dans ce domaine, Culture prolétarienne, de Marcel Martinet2.
Henri Clément1. Petit cours d’autodéfense intellectuelle, Lux, 2006. disponible aux éditions Lux.2. Culture prolétarienne, Agone, 2004.
Flammarion, 116 pages, 8 euros