À la CIBDI – Quai de la Charente à Angoulême. Jusqu’au 4 novembre. Du mardi au vendredi de 10 h à 18 h ; samedi, dimanche et jours fériés de 14 h à 18 h.
Pendant longtemps, la BD arabe se résumait à l’excellent travail des caricaturistes ou à l’adaptation d’illustrés américains ou franco-belges pour la jeunesse. Depuis une dizaine d’années, les auteurs de BD ont contribué au bouillonnement régional. Rappelons ainsi que le dessinateur égyptien Magdy El-Shafee avait été condamné en 2008 après avoir publié le un roman graphique, le premier du genre en arabe, qui dénonçait la corruption : Métro.
Pour permettre le développement du 9e art et faciliter sa présentation à un public plus ou moins large selon la situation politique, les auteurEs se sont souvent constitués en collectifs.
Force, humour et rage
Des rues du Caire, de Bagdad ou de Casablanca aux immeubles de Beyrouth, les récits graphiques témoignent de la solitude, du harcèlement ou de la guerre avec force, humour et rage. Certains membres du collectif « Comics Syria » continuent leur activité dans des circonstances tragiques et, parfois, au péril de leur vie.
Cette nouvelle génération, qui compte un nombre important de femmes, confronte une tradition arabe aux formes graphiques occidentales ou japonaises les plus modernes, et cherche sa voie. Elle s’exprime en arabe, anglais ou français. Elle explore aussi les sentiments, la sensualité, la liberté des femmes et la religion et, ce faisant, prend des risques importants. À titre d’exemple, le collectif « Samandal » a publié en 2016 un numéro consacré à la sexualité mais l’a fait imprimer en France en lieu et place du Liban.
L’exposition présente la « nouvelle scène » de la BD arabe à travers des planches originales, plusieurs dizaines d’exemplaires de revues, d’albums individuels ou collectifs des nouveaux acteurs et actrices de la BD, soit plus d’une quarantaine d’auteurEs venant d’Algérie, d’Égypte, d’Irak, de Jordanie, du Liban, de Libye, du Maroc, de Palestine, de Syrie et de Tunisie.
Cinq de ces auteurEs sont restés en résidence « créative » à Angoulême pour plusieurs mois. L’exposition et l’initiative méritent notre soutien car ces auteurEs sont confrontés à une grande précarité, où la liberté n’est jamais assurée et l’avenir incertain. L’événement devrait susciter des éditions françaises pour les principaux auteurs présentés mais, en attendant, un riche catalogue est disponible à la librairie de la Cité Internationale de la bande dessinée et de l’image (CIBDI). Il accompagne et complète l’exposition.
Sylvain Chardon