Film suédois, 2 h 48 min, 1976. Diffusé sur Netflix.
Dans la lignée actuelle d’un certain nombre d’autres films dont Netflix a racheté les droits, comme la Famille Van Paemel (Het gezin Van Paemel) – sur la vie des paysans flamands dans la Belgique de 1888 – ou Sonny Boy – une histoire des Pays-Bas sous l’occupation, c’est un nouveau chef-d’œuvre d’histoire sociale méconnu qui est exhumé par la plateforme : la Ville de mes rêves (Mina drömmars stad).
La lente naissance d’une classe ouvrière
Adaptée d’une quadrilogie littéraire de Per Anders Fogelström (malheureusement non traduite en français), cette chronique très zolaesque, ou dickensienne, nous conte la Suède de 1860 à 1880. Dans des conditions effroyables, entre répression sauvage et famine, on assiste à l’exode rural vers Stockholm (surnommée « la ville de mes rêves » par le personnage principal, non sans ironie). Les écrits de Karl Marx commencent à circuler, des grèves sauvages éclatent, des syndicats se forment. C’est la lente naissance d’une classe ouvrière et de sa conscience.
Et au milieu, le travailleur pauvre Henning Nilsson, sa famille et leurs amis. Leur vie faite de surexploitation et de misère, des moments de fêtes populaires et de solidarité ; mais aussi de grande violence dans un milieu ravagé par l’alcoolisme, l’épuisement, les violences conjugales et les maladies. Avec de rares espoirs d’ascension sociale ou de sortie de la pauvreté pour leurs enfants, via leur éducation confiée à des bourgeois paternalistes.
Un film aussi beau que dur, avec des acteurs brillants. On appréciera le diptyque officieux qu’il forme avec 1939, autre fresque magistrale disponible sur Netflix, et qui se penche lui sur l’histoire de la Suède pendant la Seconde Guerre mondiale et ses relations plus que douteuses avec le nazisme.