De Pierre Douillard-Lefevre Le Bord de l’eau, 2016, 8 euros. Commander à la Librairie La Brèche.
«En 2007, je perds l’usage d’un œil touché par un tir de lanceur de balles. C’est en spectateur d’une époque résolument sécuritaire que j’écris les pages qui vont suivre. Analyse sociale et politique autant que recension de faits contemporains, cet écrit s’adresse autant à ceux qui ignorent tout des logiques policières qu’à ceux qui cherchent à aiguiser une légitime défiance vis-à-vis de l’État et de sa violence »...
Jamais livre n’aura été plus opportun que cet essai. En 83 pages, il nous dresse un état des lieux des violences policières commises ces dernières années qui fait frémir, et plus précisément depuis l’accession de Sarkozy à la présidence. L’accoutumance de la société aux exactions de la police, le zapping permanent qui nous fait passer d’une indignation à une autre nous auraient-ils anesthésiés ? Dans une longue et salutaire litanie, l’auteur nous ramène les pieds sur terre.
Mais l’ouvrage ne se contente pas de faire un simple travail de recension comme l’avait fait l’Unef à l’issue de Mai 68 en publiant le Livre noir des journées de mai. L’auteur revient sur la militarisation policière dans les 20 dernières années, et l’évolution du matériel de répression dont ont été peu à peu dotés les policiers... Du flash-ball au flash-ball « super pro » en passant par le lanceur de balles de défense (LDB40), on assiste à un accroissement de la dangerosité. Le LDB40, utilisé aujourd’hui pour réprimer les manifestations, est classé dans la catégorie des armes létales « arme à feu à usage militaire ». Pas plus que la droite, le Parti socialiste n’est épargné par l’auteur dans leur gestion de la violence d’État : « François Hollande n’a fait que perpétuer la longue tradition, entachée de sang, de ses prédécesseurs ».
L’ouvrage est celui d’un militant qui s’adresse au mouvement social : « Les mois qui viennent de s’écouler ont vu l’histoire s’accélérer et la situation devenir plus périeuse qu’elle ne l’était déjà. L’actualité ne tarissant pas la surenchère policière, ni la cascade de blessures, mutilations et décès causés par la police, ces pages ne sont donc qu’une amorce qu’il nous faudra compléter collectivement ». Vivement conseillé !
Alain Pojolat