Publié le Vendredi 8 septembre 2023 à 12h00.

Paletó et moi, souvenirs de mon père indigène d’Aparecida Vilaça

Traduit du portugais par Diniz Galhos, Éditions Marchialy, 2023, 280 pages, 21,10 euros.

Aparecida Vilaça est professeure d’anthropologie sociale à l’université fédérale de Rio de Janeiro. Ses recherches la conduisent dans la région brésilienne du Rondônia, au cœur de la forêt amazonienne, au contact des Wari’, dont elle doit étudier la vie, les mœurs, l’organisation sociale. C’est de cela que parle son livre, mais pas que...

Peuples anéantis

On pourrait s’attendre à ce que cet ouvrage soit la stricte reconstitution du travail de l’autrice, que le sujet qui l’occupe pleinement soit la description anthropologique des Wari’, de leurs sous-groupes OroNao’ et OroAt dont sont originaires les parents de Paletó. C’est en partie le sujet du livre, qui permet de rendre compte du premier contact des Wari’ avec les blancs, dans les années 1950 à 1960... Un contact qui leur coûte cher, tant la pénétration de la forêt amazonienne par les seringueiros [ouvriers chargés de la collecte du latex] se solde pour eux par la mort violente, le repli toujours plus loin dans la forêt, la destruction de leur écosystème et la décimation par des épidémies portées par leurs envahisseurs. Pour compléter l’œuvre de destruction de leur identité, les missionnaires catholiques ou évangélistes leur imposent peu à peu leur religion et l’aliénation. Ainsi, en quelques générations, ces peuples sont décimés et anéantis au niveau culturel.

Paletó et Aparecida

On pourrait penser que la narration des relations personnelles de l’autrice avec certains individus du peuple Wari’ est un artifice lui permettant de raconter son expérience de manière plus vivante. Cependant, au fil des pages, s’écrit une tout autre histoire ! Ce dont nous parle magnifiquement Aparecida, c’est la manière dont Paletó devient son père, et comment la famille de Paletó devient leur famille à elle, à son compagnon, à leurs enfants.

Les anthropologues travaillent en immersion, au contact étroit de leurs sujets d’étude, et l’on voit comment la force et la bonté des Wari’, au travers de leurs relations coutumières, constituent leur entourage proche en leur famille réelle, comment la vie avec eux institue une relation familiale authentique, et comment Aparecida et les siens deviennent vraiment des membres à part entière de la famille de Paletó. La disparition de celui-ci fournit à l’autrice l’occasion de lui rendre un vibrant hommage, plein d’une belle humanité.