De Romain Slocombe, Éditions Robert Laffont, 2016, 21 euros.
Sadorski est un flic sérieux, qui enquête sérieusement, que ce soit sur les délinquants ordinaires, sur les étrangers en situation irrégulière, sur les juifs, les résistants, les communistes... Pétainiste et antisémite convaincu, il agit donc en toute bonne conscience puisque nous sommes en 1942. Non seulement il obéit aux ordres, mais il en fait même un peu plus qu’on ne lui en demande. Ce n’est pourtant pas le pire des policiers de l’époque. Il est même parfois capable d’éprouver des sentiments humains, non seulement à l’égard de son épouse mais aussi de sa petite voisine juive.
Convoqué manu militari en Allemagne dans le cadre d’une obscure affaire, il trouve même que les nazis exagèrent. Il va en effet, malgré son zèle, se trouver mêlé à une sombre histoire d’espionnage où se croisent les divers services allemands et leurs auxiliaires français, un de ses indicateurs e t une ancienne maîtresse, au point d’être soupçonné lui-même de jouer un double jeu. D’autant que son nom pourrait laisser penser qu’il a des origines juives... Comment va-t-il se sortir de ce guêpier ? L’intrigue nous entraîne dans toutes les arcanes des officines de collaboration de l’époque, où la pègre croise le beau monde, industriels et vedettes de cinéma.
Le roman de Slocombe vaut surtout par le portrait de ce personnage lâche et ambigu, comme par sa très abondante documentation. L’auteur n’a d’ailleurs pas résisté à entrecouper son récit de rapports authentiques et de lettres anonymes de dénonciation puisées dans les archives. Un roman touffu qui nous rappelle que le comportement humain est parfois bien étrange, même dans les pires situations.
Gérard Delteil