Publié le Jeudi 30 avril 2015 à 22h22.

Vietnam : Une guerre totale

L’intervention des États-Unis en Indochine, c’est tout d’abord une escalade militaire sans équivalent en dehors des guerres mondiales...

Les immenses moyens déployés dans la région sont mis à contribution, des bases d’Okinawa à celles de Thaïlande transformées en « porte-avion terrestre ». La 7e Flotte pilonne les côtes vietnamiennes alors que son aviation peut intervenir en des temps très courts. Les bombardiers géants B52 opèrent eux de très haut, dévastateurs. Pour la première fois, les hélicoptères sont engagés très massivement dans les combats (la France les avait déjà utilisés en Algérie). Napalm, défoliants (l’agent orange qui empoisonne toujours le pays), bombes à fragmentation… À part l’arme atomique et la destruction des principales digues qui aurait noyé sous les flots une partie du Nord Vietnam, deux mesures dont les conséquences internationales étaient imprévisibles, tout est mis en œuvre.

Le corps expéditionnaire US atteint les 550 000 hommes. Deux fois plus de tonnes de bombes sont déversées sur le petit territoire indochinois que par l’ensemble des alliés sur tous les fronts du conflit 39-45. En tout, pas loin de 9 millions de militaires US ont participé au conflit.

Les USA sur plusieurs fronts...

La guerre se mène en de multiples domaines. Au Sud, un plan d’assassinats cible les cadres du Front national de libération, le plan Phoenix qui fait plusieurs dizaines de milliers de victimes. Une réforme agraire est mise en œuvre pour contrer celle héritée du Vietminh et pour tenter de constituer une base sociale au régime saïgonnais (des fermiers capitalistes). Les populations rurales sont regroupées en hameaux stratégiques et un système de contrôle policier, foyer par foyer, est instauré jusque dans les villes pour mieux repérer toute personne non recensée. Pour réduire le nombre des pertes humaines dans le corps expéditionnaire, la « vietnamisation » des forces armées contre-révolutionnaires est décidée…

Aux États-Unis, l’économie est mise à contribution pour l’effort de guerre, ainsi que le corps scientifique à qui le gouvernement demande d’élargir la palette des engins de mort : des bombes pénétrantes pour détruire les tunnels, des détecteurs de chaleur pour repérer la présence humaine, des mines antipersonnelles se fondant dans l’environnement naturel… Dans leur très grande majorité, les scientifiques s’exécutent sans état d’âme, jusqu’au moment où le mouvement antiguerre prend son envol avec l’augmentation des pertes étatsuniennes : 60 000 GI ont trouvé la mort, pour quelque trois millions de Vietnamiens…

Malgré des pertes considérables, qui auront de graves conséquences après la victoire (l’infrastructure militante en cadres révolutionnaires originaires du Sud est très affaiblie), la résistance vietnamienne tient bon. Aux Etats-Unis, le coût économique devient exorbitant, et le mouvement antiguerre devient un facteur d’instabilité politique interne. L’année 1968 a secoué l’Occident… Washington est forcé à négocier. Deux ans après la signature des accords de Paris (janvier 1973), le régime saïgonnais s’effondre.