Je ne laisserai pas faire ceux qui nient l’avenir de l’Europe, qui veulent retourner dans les vieilles frontières, en pensant qu’elles les mettraient à l’abri, qui veulent sortir de l’euro. - Fr. Hollande, I.I.2014
En guise de présentation
On sait que le principal thème de débat lors de la récente rencontre nationale des comités NPA (décembre 2013) a été la question de l'Europe.
On a pu y constater un très large accord quant à l'appréciation de la « construction européenne ». Par contre, des nuances existent entre nous quant à la façon d'apprécier la question de l'€. D'où ce texte qui vise à poursuivre une discussion juste effleurée lors de cette rencontre.
Et cette discussion est importante. Car si l'ennemi principal demeure dans notre pays, il y a désormais peu de questions politiques qui n'aient pas une dimension « européenne ». Ainsi comment combattre le budget sans poser la question du TSCG, comment ignorer que la réforme ferroviaire en cours est inséparable des projets d'« espace ferroviaire européen » ?
Maastricht, € : brefs rappels
Un texte de formation récent étant revenu en détail sur le contenu de « la construction européenne », inutile de s'étendre longuement [i].
Rappelons simplement que le traité de Maastricht (1992) est le traité constitutif de l'Union Européenne. Une des clauses essentielles du Traité était la décision de s'engager dans la construction d'une Union Économique et Monétaire, basée sur une monnaie unique, l'€, gérée par une Banque Centrale Européenne. Mais pour que le projet soit viable, les économies des pays membres devaient respecter certains critères dits de « convergence ». En premier lieu : un déficit public annuel inférieur à 3 % du PIB, une dette publique inférieure à 60 % du PIB. En clair, la mise en place et la survie de l'€ sont inconcevables sans la poursuite d'une politique d'austérité stricte, et le respect de ces critères.
On comprend donc ce qu'écrivait fort justement Fr. Chesnais dès 1998, quelques mois avant le lancement effectif de l'€ :
C'est contre la classe ouvrière (...) que la mise en œuvre de l'€ va se faire le plus directement. Sur ce point aucun « militant » (...) ne peut avoir le moindre doute, la moindre hésitation. Pour deux raisons principales. La première, c'est qu'en tant qu'institution appelée à servir les intérêts, en premier lieu du capital qui se valorise comme capital-argent, la BCE va poursuivre (...) l'application de politiques destinées à opérer le transfert de fractions importantes du PNB au profit des « créanciers », à imposer le maintien d'une conjoncture déflationniste congénitalement propice au chômage et à la baisse des salaires (...).
La seconde raison pour laquelle l'€ va amener une aggravation très sérieuse de la situation des salariés, c'est que le « travail », c'est-à-dire les salaires et les conditions de travail, deviennent pour la bourgeoisie de chaque pays la principale, sinon l'unique « variable d'ajustement »[ii].
Ce pronostic fut largement vérifié :
Avec le recul du temps et l’expérience de la crise, on mesure mieux à quel point la création de l’€ a été, compte tenu de ses modalités, une catastrophe pour les peuples européens et pour l’idée même d’Europe. Par définition, la monnaie unique rend impossible tout ajustement du taux de change, mais aucun mécanisme de transfert n’a été prévu : budget limité, interdiction faite à la BCE de financer les déficits des États membres, etc. Dans ces conditions, un mécanisme infernal est déclenché à partir du moment où les taux d’inflation se mettent à diverger. Et c’était inévitable compte tenu des différences structurelles entre les économies de la zone € (même si personne n’avait vraiment pointé ce problème). (...)
Cette situation est inextricable puisque tous les outils qui permettraient de la gérer sont en quelque sorte anti-constitutionnels. La voie choisie par les institutions européennes et les gouvernements de la zone a pu concéder quelques entorses aux préceptes eurolibéraux, mais elle s’est très vite orientée vers une thérapie de choc[iii].
Ajoutons à ce réquisitoire que le récent Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance (TSCG), adopté en 2013, durcit encore le dispositif. Au final personne ne doute que l'€ a été un outil décisif des capitalistes dans leur offensive contre les travailleurs.
Une sourde hostilité
Dans ce contexte, on ne peut que partager l'hostilité à « l'Europe » (comprendre l'Union Européenne) et à la monnaie unique qui se développe. L'UE est considérée, à juste titre, comme dominée par les ultra-libéraux, et l'€, la BCE, vus comme leur instrument par les plus larges masses. II existe certes une hostilité à l'UE d'origine souverainiste, néo-gaulliste ou d'extrême-droite. Mais l'essentiel, ce sont les millions de travailleurs, de jeunes, qui ont compris que l'UE et ses diverses projections sont autant d'outils des capitalistes contre leurs acquis.
Déjà en 1992, le résultat particulièrement étriqué du référendum (51.04% pour l'approbation du traité de Maastricht) ne peut s'expliquer sans considérer que de larges couches populaires s'étaient mobilisées, pour infliger un coup d'arrêt à la politique « néo-libérale ».
Puis il y eut l'épisode du référendum relatif au Traité Constitutionnel Européen (2005), et l'émergence du « non de gauche ».
Encore récemment, le résultat enregistré par Montebourg lors de la primaire socialiste (17%) est significatif. Faisant campagne sur le thème très ambigu de la démondialisation, son succès s'explique bien plus par rejet de la politique européenne de la direction du PS que par adhésion à au programme défendu par Montebourg (auquel personne ne croit et en l'absence de toute alternative se situant sur un terrain de classe authentique).
Tout ceci pour dire que personne n'est obligé de tomber dans le piège tendu par Hollande (cf. citation ci-dessus). On peut très bien être contre l'€ pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le chauvinisme. On peut être contre l'€ parce qu'en l'absence d'Europe des Travailleurs, ça ne peut que faciliter la mise en place de politiques anti-ouvrières.
Le PGE en congrès
Le débat en cours n'est pas propre au NPA. Il suffit de citer le discours fait par P. Laurent en ouverture du récent congrès du « Parti de la Gauche européenne » :
Des voix s’élèvent alors en faveur du retrait de tel ou tel pays de la zone euro, ce qui aboutirait à plus ou moins court terme, à la dissolution de celle-ci. (...) Dans le monde impitoyable où nous nous trouvons, elle pousserait les peuples, devenus encore plus concurrents, à se livrer une guerre économique sans merci. Les grands groupes et les états hégémoniques seraient sans doute les seuls gagnants de ce « chacun pour soi ».
Pour promouvoir les solidarités et l’esprit coopératif qui nous font aujourd’hui si cruellement défaut, nous pensons que nous avons besoin d’une Union Européenne, radicalement différente, d'une Europe refondée sur d'autres bases.
Et il précise ces bases : stopper les politiques d’austérité, réorienter la BCE, sortir de l'OTAN, etc.
Le but essentiel de tout ceci est d'annoncer qu'en cas de gouvernement SYRIZA en Grèce, il ne sera pas question de rompre avec l'impérialisme, avec la troïka UE-BCE-FMI (car c'est ce que signifierait une sortie de l'€).
Mais l'exemple grec est aussi instructif pour nous. Comment imaginer un gouvernement des travailleurs de Grèce plaçant sa politique monétaire, le cœur de sa politique économique, sous le contrôle de la BCE, de Merkel, des banquiers franco-allemands, etc. ? Le choix de demeurer ou sortir de l'Union Économique et Monétaire est en fait celui de la nature réelle d'un éventuel « gouvernement des gauches » en Grèce. La position de P. Laurent et des dirigeants du PGE est parfaitement cohérente.
Au Front de Gauche...
Dans le même ordre d'idées, il faut aussi mentionner les prises de positions de M. Husson, puisqu'elles ont une certaine influence au sein du NPA (même si lui-même appartient au FdG). Husson s'oppose au mot d'ordre de sortie de l'€ car
une « sortie sèche » de l'€ donnerait à la finance internationale une arme redoutable, celle de la spéculation contre la « nouvelle » monnaie (...).
Et il précise :
Il y a deux grands arguments économiques contre une « sortie sèche » de l'€. Le premier est celui de la dette : libellée en €, son montant augmenterait à proportion du taux de dévaluation de la nouvelle monnaie.(...)
L’autre argument avancé par les économistes du PCF consistait à dire que la sortie de l’€ et la dévaluation de la nouvelle monnaie se passeraient « dans un contexte de spéculation déchaînée ».
En d'autres termes, il n'est pas possible d'abroger le traité de Maastricht, de rompre avec la BCE et son €, sans remettre en cause de fond en comble le fonctionnement du système, ce qui est visiblement hors du périmètre envisagé par Husson (il envisage le paiement de la Dette) – encore plus « des économistes du PCF », comme on l'imagine. En clair, rompre avec l'€ ne peut s'envisager que dans le cadre d'une politique révolutionnaire globale.
Husson lui-même donne lui-même la réponse des anticapitalistes à ses objections. Il cite en effet un extrait de l'importante contribution de C. Lapavitsas[iv] au recueil « En finir avec l'Europe » :
La dévaluation de la monnaie serait accompagnée d’une cessation de paiement et d’une restructuration de la dette publique. Pour empêcher l’effondrement du système financier, la nationalisation des banques serait indispensable, ce qui aboutirait à la création d’un service public bancaire. Il faudrait également imposer des contrôles pour empêcher la fuite des capitaux. Enfin, pour soutenir la croissance et l’emploi, la propriété publique devrait s’étendre dans une série de secteurs clés de l’économie, notamment les services collectifs, le transport et l’énergie. Sur cette base, il deviendrait possible de développer une politique industrielle qui mobiliserait les ressources et les crédits publics.
Ce que Lapavitsas décrit ici, c'est la première lettre de la politique que suivrait un gouvernement anti-austérité, le gouvernement des travailleurs de Grèce. Dans ses grandes lignes, ce n'est rien d'autre que notre programme.
Refonder l'Union européenne ?
Toutes les élaborations issues des milieux liés au front de Gauche convergent vers l'objectif de « refonder » l'Union Européenne, ainsi explicité par la direction du PCF :
(...) il est juste de mettre en avant désormais l’objectif de refondation de l’Europe qui souligne l’exigence de transformations très radicales. Mais, pour autant, gardons-nous de donner à penser que cet objectif pourrait être atteint au terme d’un « grand soir » qui permettrait de faire en quelque sorte « table rase ». Ne réactivons pas, à propos de l’Europe, l’opposition que nous avons décidé de dépasser entre réformes et révolution. Nous devons articuler à l’exigence nécessaire de refondation le réalisme d’un combat quotidien efficace pour réorienter cette construction en visant sa refondation. D’où l’importance décisive de propositions concrètes, cohérentes et mobilisatrices donnant à voir, à l’appui des luttes et du débat politique, la possibilité d’une alternative crédible.[v]
On aboutit ainsi à des « propositions » lues mille fois, avant tout celle d'une réorientation de la BCE et plus généralement de la politique monétaire.
Seul petit problème : comment croire que de telles mesures seraient possible sous le règne de Merkel, Barroso, Hollande et les autres ? Et si ce n'est pas le cas, dira-t-on alors aux travailleurs d'Europe – par exemple ceux de Grèce – qu'il est nécessaire d'attendre la chute des gouvernements bourgeois des principaux pays d'Europe, qu'en attendant, la seule solution serait de se soumettre à Maastricht et à la BCE ?
Contre l'impasse du réformisme, il nous faut défendre une politique révolutionnaire pour l'Europe. Notre objectif est évidemment de construire une Europe des travailleurs fédérant ses gouvernements anti-austérité.
En tout cas, aux constructions du PGE, auxquelles personne ne croit (« une bonne UE », la « refondation de l'UE »), on doit opposer ce qu'écrivait Fr. Sabado :
la rupture avec le type de construction européenne et tous les traités européens: Maastricht Amsterdam, Lisbonne et les institutions européennes, car l’UE n’est pas réformable. Il n’y a pas de politique possible de réorientation de l’Europe qui est dès l’origine néo-libérale et antidémocratique. Il faut rompre avec le type de construction européenne mais pas avec l’Europe[vi].
Notre modèle est celui de la fédération de gouvernements anti-capitalistes européens. En aucun cas, on ne peut laisser l'illusion qu'il serait possible d'« améliorer », de « refonder » une UE sans en finir préalablement avec les gouvernements de Merkel, Hollande, Rajoy, etc.
Et Lutte Ouvrière ?
LO exerce aussi sur les rangs du NPA une certaine influence. Raison de plus pour se pencher sur les positions de cette organisation.
On sait que LO est farouchement opposée à toute idée de rupture avec la BCE et son €. Elle ne voit que « chauvinisme » dans tout ceci. Ces conceptions ont abouti à ce que cette organisation, quasiment seule dans le mouvement ouvrier, prenne la décision absurde de refuser d'appeler à rejeter le traité de Maastricht lors du référendum de 1992 (elle appela à s'abstenir). Or vu le contenu d'un tel Traité, il était mille fois justifié d'appeler à rejeter ce traité ainsi que le fit la LCR.
En tout cas, il n'est pas inutile de rappeler ce qu'on pouvait alors lire dans Lutte de Classe[1] :
L'Europe bourgeoise qui se dessine n'est en elle-même ni un bien ni un mal pour les travailleurs. Si les travailleurs laissent les mains entièrement libres à la bourgeoisie, la construction européenne sera à coup sûr un prétexte, sinon la véritable raison de nouvelles attaques contre la classe ouvrière, contre ses droits sociaux, contre son niveau de vie.
Mais elle peut devenir un avantage si les travailleurs des différents pays européens se sentent plus solidaires les uns des autres, s'ils se reconnaissent dans les combats qui se mènent de l'autre côté des frontières.[vii]
Partant de là, on peut comprendre le refus de LO à combattre l'UE, ce qui l'amena à des caractérisations d'une rare finesse :
(...) dans le débat en cours, si ce n'est évidemment pas le rôle des révolutionnaires de seconder Mitterrand et la direction du Parti Socialiste en dépeignant l'Europe de Maastricht sous des couleurs roses, il n'est certainement pas non plus de la combattre. Car, dans le contexte actuel, ce serait joindre sa voix au chœur des démagogues qui misent sur le nationalisme, de Le Pen à Marchais[viii].
Pas question, donc, de combattre les institutions réactionnaires de Bruxelles... En fait LO confond l'agitation anti-UE avec le sinistre « Produisons français ! » cher à tous les nostalgiques du stalinisme. Or ce n'est pas du tout la même chose.
Dans la continuité de ces positions « historiques », LO annonce ses plans pour les élections européennes de 2014 ainsi :
Nous redirons dans ces élections, comme nous l’avons fait lors des précédentes, que l’unification de l’Europe même sur des bases capitalistes aurait été un progrès (!?! - NdR). Mais, justement, la bourgeoisie n’est plus capable de politique de progrès dans aucun domaine.
Nous redirons que nous sommes contre les frontières nationales et les barrières protectionnistes qui morcellent l’Europe et son économie.
Contre toutes les formes de démagogie chauvine, ouvertes ou feutrées, contre le protectionnisme qui ne protège que les intérêts capitalistes, pas ceux des exploités, nous affirmerons la conviction que « les prolétaires n’ont pas de patrie »[ix].
Il y aurait beaucoup à dire sur tout ceci, sur les confusions politiques qu'on peut y trouver. Mais le problème essentiel, c'est qu'on n'y trouve pas un mot sur Maastricht, le TSCG. Faut-il ou pas dénoncer ces traités ? Quelle place donner à ces revendications ? Pas un mot sur tout ceci, et c'est une constante dans les documents de cette organisation.
Pour LO, l'ennemi principal, visiblement, c'est avant tout le « chauvin ». Nous considérons quant à nous que le rejet des institutions de Bruxelles par les masses est totalement justifié, qu'il nous revient de nous inscrire dans ce mouvement, mais dans la plus stricte indépendance vis-à-vis des chauvins. Ce n'est évidemment pas la même chose.
« Démondialisation » ?
L'hostilité sourde à l'UE et ses institutions est désormais telle que toute sorte de démagogues se sont saisis de la question. Certains économistes cherchent une issue « réaliste », dans le cadre de l'économie de profit. Ainsi a émergé récemment le concept de « démondialisation », qui est effectivement pour le moins ambigu, voire ouvertement chauvin. Les mesures suivantes sont préconisées :
« L’instauration, aux frontières de l’Union européenne, de taxes importantes et, en son sein, de montants compensatoires sociaux et écologiques » ;
- le passage à une logique de la monnaie commune avec l’institution, durant la phase intermédiaire, d’un « mécanisme de financement direct d’une part des déficits publics, par des avances au Trésor des différents pays » ;
- une « politique industrielle et d’infrastructures (énergie, transport, communication) dans les pays de la zone euro »[x]
Le problème est qu'à l'heure de la mondialisation capitaliste, tout ceci n'est guère crédible. Alors que la division internationale du Travail a fait les progrès que l'on sait imaginer un retour à une économie française semi-fermée sur elle-même est du domaine de la galéjade. Au delà de son caractère utopique, c'est un programme réactionnaire. Ce n'est pas sans raison que le FN a recours à ces thèses.
Certes, quasi-obligatoirement, le gouvernement anticapitaliste pour lequel nous nous battons devrait établir le monopole du commerce extérieur, des mouvements de capitaux – tous les gouvernements de ce type y ont été contraints. Mais le recours à ces mesures ne peut être que transitoire, dans l'attente d'une extension du mouvement à d'autres pays. En aucun cas, ce type de mesure ne peut être présenté comme un objectif en soi.
Il faut donc évidemment combattre ces thèses et le chauvinisme qui les sous-tend. Mais on ne le fera qu'en répondant aux vrais problèmes qui sont posés et permettent à ce type de courants d'exister.
Retour au NPA
Tout ceci pour revenir à l'exposé fait par Fr. Sabado aux rencontres de décembre. Il aborde ainsi la question de la sortie de l'€ :
C’est politiquement dangereux car c’est créer les conditions d’une union sacrée nationaliste pour défendre la nouvelle monnaie nationale. C’est surtout confondre le fond - quelles politique économique - et les instruments comme la monnaie. Faire, en France, par exemple, de la « sortie de l’€ » une question centrale, c’est tomber dans le piège du Front national, qui fait de ce découpage politique, une discriminant politique majeur[xi].
Tout le problème, c'est que l'€ EST une question centrale, qu'il le veuille ou non. Les masses savent que c'est la concrétisation de tout un dispositif qui leur a déjà coûté fort cher. Et ignorer la question, c'est les renvoyer dans les bras des vrais chauvins, parfois acoquinés avec le Front National.
Autre chose est bien sur de formuler la question en des termes qui évitent une convergence avec les chauvins, étant entendu que dénoncer Maastricht, revient à quitter l'€. On peut tourner autour du pot autant qu'on le voudra, mais soit on est contre Maastricht, ses « critères », et ça signifie rompre avec la BCE, donc l'€, soit on est pour appliquer Maastricht.
Et Sabado poursuit :
Il peut y avoir des situations, comme en Grèce où face au chantage de l’UE qui dit, « Il faut choisir, soit l'€ et l’austérité », soit « vous refusez l’austérité, mais, alors là, vous n’aurez plus l'€ ». Même si c’est difficile, les camarades grecs ont raison de dire : « Nous refusons ce chantage, nous ne ferons pas de sacrifices pour l’euro et nous n’accepterons pas les plans d’austérité, quitte à ce vous nous expulsiez de l’Union européenne ». Mais c’est une réponse de crise. La réponse de « programme » face aux développements mondiaux, la crise et les besoins des peuples, c’est de répondre à l’échelle d’espaces plus larges, d’échelles qui permettent une meilleure répartition des richesses et de nouvelles divisions du travail correspondant aux besoins.
Là encore on ne peut qu'avoir des doutes sur la nécessité de développer des politiques différentes selon les pays (au-delà de questions de formulation reflétant les spécificités de la lutte de classes dans chaque pays). Partout en Europe, les travailleurs sont confrontés au démantèlement des leurs acquis, à une austérité brutale – de l'Allemagne à la Grèce. Dans toute l'Europe du Sud, la troïka UE-BCE-FMI est honnie par les peuples. Dans ces conditions, c'est plutôt une politique commune qui doit être dégagée, visant à les unir contre leurs gouvernements respectifs et l'Union Européenne, vers les États-Unis Socialistes d'Europe.
Mais en tout état de cause, une politique de « programme », c'est-à-dire une propagande pour l'Europe des Travailleurs ne peut se concevoir sans une agitation pour la dénonciation des traités européens, Maastricht en tête. Car les masses se heurtent quotidiennement aux conséquences de ce Traité.
En clair notre politique européenne, si elle veut répondre aux problèmes posés partout en Europe ne peut se faire que dans le cadre politique suivant :
- Pour la dénonciation des Traités européens anti-ouvriers (Maastricht, TSCG et autres)
- Pour la rupture avec la BCE et son euro, contre l'austérité perpétuelle
- Pour l'Europe des Travailleurs*
Et il n'y a aucune concession aux chauvins dans tout ceci !
Pascal Morsu (12 janvier 2014)
Notes
[1] On n'a pas lu depuis d’autocritique sur le sujet, bien au contraire.
[i] Cf C Samary, P. Morsu : UE et mondialisation (parmi de nombreux travaux d'autres contributeurs).
[ii] Fr. Chesnais : A propos de l'€... - Carré Rouge n°8 (1998).
[iii] M. Husson : La « sortie sèche » de l’euro : une triple erreur stratégique, Contretemps n°19.
[iv] C. Lapavitsas : L ‘euro en crise ou la logique perverse de la monnaie unique.
[v] Y. Dimicoli : Notre projet pour une refondation de l'Union européenne. Économie et Politique, mai-juin 2013.
[vi] Fr. Sabado : Rapport sur la question européenne, 14.XII.2013.
[vii] Lutte de classe n°48 – juillet-août 1992.
[viii] Ibid.
[ix] Lutte de classe n°156 – décembre 2013.
[x] Cf. M. Husson : Les limites du protectionnisme fiscal.
[xi] Fr. Sabado : Ibid.