Publié le Dimanche 6 octobre 2013 à 10h57.

Latelec-Tunisie : patrons voyous bien français !

Les multinationales cherchent à opposer les salariés des différents pays les uns contre les autres afin de mieux les exploiter. La lutte menée par les syndicalistes de Latelec, la filiale tunisienne de l’entreprise française Latécoère, est à cet égard exemplaire. Il en va de même du mouvement de solidarité international qui s’est mis en place pour les soutenir. Déléguées syndicales de l’UGTT Latelec Fouchana, mandatée par la région UGTT de Ben Arous,

Sonia Jebali et Monia Dridi viennent d’effectuer une tournée de solidarité en France.Latelec s’est installée dans la région de Tunis en 2005. Elle a bénéficié d’une loi permettant aux entreprises étrangères de ne pas payer d’impôts pendant 10 ans. La production n’est pas destinée à la population locale et va essentiellement à deux gros clients Airbus et Dassault.Face aux conditions de travail insupportables, un groupe d’ouvrières décide le 18 mars 2011 de monter un syndicat de base UGTT regroupant 420 ouvrières (sur 450 salariéEs). Avec la création du syndicat, des revendications pour un travail digne sont déposées sur le bureau du patron ; elles ne supportent plus les insultes, les menaces et le harcèlement sexuel de leurs supérieurs, les heures supplémentaires imposées et non payées, le non-respect de la durée légale des congés payés (déjà pas bien contraignante), les salaires trop bas (environ 120 euros par mois).

Menaces, pressions... et grèveAprès toutes sortes de menaces, notamment de licenciement des déléguées syndicales, la direction, face à la détermination des ouvrières, finit par accepter une grille de classification prévoyant promotions et augmentations de salaires (le 21 mai 2012).En représailles, la direction crée un syndicat jaune affilié à une nouvelle centrale syndicale, la CGTT, composée de maîtrise et cadres, et décide de ne plus négocier qu’avec celui-ci. Les déléguées syndicales UGTT ne désarment pas et décident, en septembre 2012, une journée de grève contre les pratiques de la direction.L’audace de ces travailleuses ne plaît pas du tout aux patrons qui leur répètent en permanence « vous êtes des femmes, vous ne comprenez pas bien... ». Ceux-ci ne reculent devant rien : ils ferment les portes de l’entreprise sans explications ni préavis, et exigent devant l’inspection du travail que les membres syndiqués soient renvoyés pour rouvrir l’entreprise. Dans ces conditions, l’ensemble des ouvrières refuse de rentrer dans l’entreprise par solidarité : c’est la grève illimitée ! La direction invente une histoire de séquestration afin de pouvoir sanctionner les déléguées syndicales et dissoudre le syndicat, mais la ténacité des ouvrières oblige la direction à rouvrir les portes.

Solidarité internationale !Mais les ouvrières se rendent compte alors que les matières premières ne sont plus là, et que la direction a décidé provisoirement de délocaliser la production en France... Les patrons refusent de renouveler les contrats temporaires de 200 ouvrières, mutent une partie des titulaires dans un autre établissement composé essentiellement de cadres, licencient sept titulaires pour refus de travail ainsi que les trois déléguées syndicales. Le syndicat organise un rassemblement devant l’ambassade de France lors du Forum social de Tunis et continue de lutter. À l’initiative de militantes féministes et de syndicalistes, un comité de soutien s’est créé en France et a permis à deux déléguées UGTT, Sonia Jebali et Monia Dridi, de se rendre « sur la terre de Latécoère » pour rencontrer notamment des syndicalistes de  Latécoère et Airbus ainsi que des militantEs féministes. Car, évidemment, le transfert de la production en France n’est que provisoire. L’objectif de la direction est uniquement de détruire le syndicat tunisien.Un coup, les délocalisations servent à réduire les dépenses salariales, un autre coup à détruire un syndicat et se débarrasser de toutes ces ouvrières qui ont lutté pour améliorer leurs conditions de travail et retrouver leur dignité ! Pour les ouvrierEs de Tunisie comme de France, un combat commun s’impose contre ce système qui laisse les mains libres au patronat pour jouer avec la vie des travailleurs.

Correspondantewww.facebook.com/ComiteSoutienSyndicalistesLatelecFouchana