Publié le Vendredi 10 décembre 2021 à 13h00.

Plogoff, une lutte au bout du monde

Sous la coordination de Jean Moalic, Gilles Simon, Fañch Le Hénaff. Éditions Locus Solus, 176 pages couleur, 27 euros.

Le 12 décembre 1981 : le décret entérinant l’abandon du projet de centrale nucléaire à Plogoff paraît au Journal officiel. C’est l’issue d’un combat de plusieurs années. 40 ans après, un livre revient sur cette lutte emblématique et en souligne la brûlante actualité.

Le livre

C’est un bel objet, cartonné souple, coloré et rempli de photos du site, des événements, des personnages. Des articles courts permettent à une quinzaine de contributeurs de mettre en évidence différents aspects de la lutte, sous la coordination d’un trio incarnant la bataille de Plogoff.

Les auteurs

Jean Moalic, d’abord, militant actif avant et après Plogoff, actuel président de l’association Plogoff mémoire d’une lutte, il a été en première ligne de 1974 à 1981. Fañch Le Hénaff, affichiste, a été militant durant les événements. Gilles Simon, enfin, par ailleurs auteur d’une thèse en sciences politiques sur Plogoff, l’apprentissage de la mobilisation sociale (un livre extraordinaire, aux Presses universitaires de Rennes, comme une modélisation d’une lutte victorieuse !). Parmi les 15 contributeurs, de nombreuses références dans les milieux militants (Gérard Borvon) et universitaires (Tudi Kernalegenn)...

Les (autres) acteurs

Le « peuple de Plogoff » est lui, omniprésent dans l’ouvrage, sur toutes les photos qui rappellent la lutte, son ancrage dans la population, l’engagement des femmes dans la lutte, y compris face aux forces de répression, les affrontements avec la police, les grandes manifestations, la plus célèbre étant celle de la baie des Trépassés en mai 1980, avec 100 000 personnes et les moutons du Larzac !

Acteur de pierre et de lande, éperon le plus avancé, au sud de la Bretagne, qui se termine par la pointe du Raz, face à l’île de Sein, c’est le cap Sizun dans son entier qui s’est levé contre la centrale. Dans chaque village des comités de résistance se sont mis en place, s’exprimant par une explosion graphique au travers d’une abondante production d’affiches et d’autocollants fleurissant sur les autos de toute la région (largement présents dans le livre) !

Bilan et perspectives !

L’ouvrage n’est pas seulement une célébration ou un simple album de famille : c’est un outil militant qui doit donner de la force, montrer que gagner est possible, tracer une voie, celle du combat déterminé (ô combien) de la multitude des sans-grades. Les actuels opposants au nucléaire y trouveront des arguments, les ressources de l’expérience, pour se motiver et ne rien lâcher.

Le livre se termine d’ailleurs par une invitation à poursuivre la lutte, avec l’appel de Plogoff du 30 août : « Nous appelons chaque citoyen à continuer la lutte antinucléaire au moment où EDF et les pouvoirs publics présentent faussement le nucléaire comme une énergie verte et décarbonée pour lutter contre le réchauffement climatique, proposent de construire 6 réacteurs nucléaires EPR alors que le chantier de Flamanville accumule les malfaçons et les retards, choisissent de prolonger les 56 réacteurs actuels pendant encore 20 ans, accélèrent le projet de stockage souterrain de déchets radioactifs à Bure dans la Meuse pour justifier la poursuite du programme nucléaire ».