Publié le Dimanche 22 mai 2016 à 10h57.

Quoi de plus normal qu’infliger la vie

De Oriane Lassus, Éditions Arbitraire, 2016, 16 euros. 

La première chose qui saute aux yeux quand on ouvre le livre, c’est qu’Oriane Lassus passe outre les normes et les standards. Les standards formels de la bande dessiné d’abord : la mise en page est explosée et chaotique, on trouve des cases de toutes formes sans pour autant ne rien perdre de fluidité à la lecture. Le dessin lui même est atypique. Tranchant et nerveux il porte parfaitement l’humour grinçant et la colère du récit.

Car le récit est aussi une critique des standards sociaux, et avant tout de l’injonction à la maternité faites aux femmes. « T’es égoïste », « C’est la plus belle chose de la vie », « Qui va payer pour nos retraites ? ». Une à une, l’autrice décortique toutes les fausses évidences qu’elle a pu entendre. Non, « infliger la vie » n’est ni normal ni la condition du bonheur des femmes et encore moins leur mission. Non, le fait que les Français soient « champions de la natalité » en Europe n’est pas en soit une « excellente nouvelle »

Avec un ton toujours satirique, c’est finalement toute la société qu’elle passe au crible, la famille, l’école, la publicité, les médias et au passage, le capitalisme : « La vie est ptêtre un poil plus un cadeau pour ceux qui naissent avec une Visa Gold dans la bouche ». C’est finalement la démonstration de la pertinence du mot d’ordre féministe « Le privé est politique ».

Matthieu (Besançon)