De Leif Davidsen. Éditions Gaïa, 525 p., 22 euros, édité au Danemark en 2010, en France en 2016.
Fin du siècle dernier : Magnus Meyer est mourant. C’est un industriel danois important, héros de la résistance, bienfaiteur des arts. Nul ne sait qu’il est aussi un assassin. Qu’il a tué des hommes en Argentine, en Espagne et en Russie. Son testament est prêt à exploser à la figure des notables.
Septembre-octobre 1936 : de peur qu’elle tombe aux mains des fascistes ou des anarchistes, le gouvernement de Front populaire évacue les réserves d’or de la Banque centrale vers le port de Carthagène puis vers Odessa (URSS). Toutes les caisses ne parviendront pas à destination.
Octobre 1937 : Magnus, de retour d’Argentine où il s’était enfui, est chargé par sa sœur de retrouver leur jeune frère, Mads, un jeune poète danois engagé au sein des Brigades internationales dans une Espagne où la contre-révolution stalinienne fait rage dans le camp des républicains tandis que les franquistes profitent à fond du soutien nazi. La mission de Magnus sera couverte par l’accréditation d’un grand journal danois.
Idéalisme flamboyant
Magnus n’est pas un militant politique mais il a été formé et informé sur la situation en Espagne par un ex-brigadiste accusé de trotskisme par la direction du PC danois. Entre Valence, Albacete, Carthagène, puis à nouveau Albacete, la recherche du frère va bien vite croiser la route de l’or et d’Irina, photographe officielle soviétique dont le père est un dirigeant important du NKVD.
Magnus retrouvera son frère encore vivant à Albacete, et l’idéalisme flamboyant du cadet se heurtera à l’instinct de vie de Magnus, éconduit par les compagnons d’armes de son frère en pleine préparation d’une mission à l’intérieur des lignes franquistes. Contre son gré et, dans l’attente du retour d’Irina du front, Magnus va conduire un journaliste étatsunien (agent du NKVD lui aussi) sur la piste de l’or dans les environs du port de Carthagène. La poudre parlera mais Magnus parviendra à retrouvera Irina et vivre avec elle un amour désespéré avant qu’un nouveau procès de Moscou ne la lui arrache…
Passionnant thriller
Ce thriller passionnant constitue une mine informative pour les militants révolutionnaires. Il faut dire que l’auteur a été grand reporter, spécialiste des pays du bloc de l’est ainsi que de l’Espagne et que ses ouvrages favoris sont Hommage à la Catalogne d’Orwell et le Zéro et l’infini de Koestler. Davidsen développe une intrigue aux multiples fils qui nous permet de rentrer dans l’intimité des combattants internationalistes confrontés aux purges staliniennes. Sa description des filières de recrutement pour l’Espagne écrite avant l’irruption de la filière djihadiste danoise pour la Syrie fait peur, comme les descriptions des bombardements aveugles de l’aviation nazie sur les civils. Pourtant ce n’est rien comparé à l’oppression et à l’angoisse permanentes des disparitions et exécutions qui se produisent dans le camp des révolutionnaires.
Un thriller efficace et un beau roman d’amour, 80 ans après l’insurrection de Barcelone.
Sylvain Chardon