À Calais, il n’est visiblement pas question que les migrantEs puissent manifester leurs demandes ni que la solidarité puisse s’exprimer. Ainsi, deux jours plus tôt, la préfecture a interdit la manifestation du 1er octobre lancée par la Coalition internationale des sans-papiers et migrants, et soutenue par différentes organisations dont Solidaires et le NPA.
Alors samedi, ça a canardé de partout : 700 grenades lacrymogènes envoyées (chiffre communiqué par la préfecture...) du sol, des ponts qui surplombent le campement et même d’hélicoptère. Rien d’étonnant pour les habitantEs de la « jungle » qui connaissent la violence au quotidien : deux jours plus tôt, les flics avaient même tiré au flashball sur un gamin de 9 ans qui en est resté paralysé...
Violences et mensonges
La manifestation avait pourtant commencé dans une bonne ambiance : slogans et danses au son d’une batucada, au nez de la haie de CRS bloquant la sortie du campement. Mais cela n’a pas duré. À l’opposé du mensonge des « forces de l’ordre » repris en boucle par les médias, ce sont bien les CRS qui ont lancé les hostilités en gazant les manifestantEs pour les repousser vers le camp. Puis ils ont utilisé leurs canons à eau... Alors seulement, les migrantEs ont riposté avec des cailloux. Légitimement. Le campement a été littéralement inondé de lacrymogènes pendant plusieurs heures et les flics se sont vengés en détruisant les sanitaires et les douches près de l’entrée.
Le pouvoir voudrait que rien ne vienne enrayer le discours dominant selon lequel la seule solution serait le démantèlement du camp de migrants. Une solution pour qui ? Certainement pas pour les migrantEs. Alors il fallait faire taire ceux et celles qui voulaient aller manifester auprès d’eux...
Pressions et interdiction
La manifestation n’a pas seulement été interdite. Des pressions directes ont été exercées, sans succès, par le chef de cabinet du préfet sur la compagnie de cars utilisée pour amener migrantEs et personnes solidaires au départ de Paris. Sans succès, les quatre cars sont bien partis samedi matin. Ils ont été arrêtés à deux reprises sur la route, avant d’être définitivement bloqués au péage avant Calais. Tous les passagerEs ont refusé de donner leurs papiers en solidarité avec les sans-papiers et réfugiés, et ont organisé une manifestation sur le bord de l’autoroute. Les chauffeurs ont aussi été menacés de garde à vue. Ce n’est plus seulement manifester ou se rassembler qui n’est plus un droit dans la France de l’état d’urgence permanent, c’est aussi celui de circuler : nous devenons tous des migrantEs !
Pourtant des personnes solidaires de toute la région et même de Belgique ont quand même réussi à accéder au campement. Des militantEs du NPA de Lille, Dunkerque, Valenciennes et Paris étaient aussi là.
Responsabilités et solidarités
Ce samedi 1er octobre a donné un avant-goût du démantèlement : cela ne se passera pas bien, et ça ne pourra qu’être pire ensuite. Parce que les migrantEs veulent aller en Angleterre et que, tant que la frontière ne s’ouvrira pas, le pouvoir ne pourra que chercher à les invisibiliser et les écraser. Au mépris de toute humanité. Au mépris de nos droits. Au mépris de Calais.
Le démantèlement est imminent, avant la fin de l’année pour Hollande, dans quelques semaines pour Valls. Peu de temps pour que chacun prenne ses responsabilités et pour organiser une initiative nationale d’envergure.
Le NPA s’opposera à toute solution qui ne tiendrait pas compte de la volonté des migrantEs exprimée par eux-mêmes. Avec eux, nous exigerons l’ouverture de la frontière avec l’Angleterre. Non au démantèlement ! Ouverture des frontières !
Philippe Poutou, Alain Pojolat et Denis Godard