Publié le Mercredi 16 septembre 2020 à 17h03.

Mano de Obra, de David Zonana

Film mexicain, 1 h 23 min,  sorti le 19 août 2020.

Le film commence par la chute mortelle d’un ouvrier, employé avec d’autres à la construction d’une maison luxueuse. Il laisse un frère, Francisco, qui travaille aussi sur le chantier, et une compagne enceinte. Le patron refuse toute indemnité, avec le soutien de l’inspection du travail dont le rapport mensonger prétend que l’ouvrier était ivre. Quant au représentant syndical, il joue plutôt le rôle d’un contremaître. La première partie du film décrit ainsi sans concession la situation des ouvriers du bâtiment à Mexico : la dureté du travail, les moments de détente, la solidarité.

Une première œuvre sombre

Face à la mauvaise foi patronale, Francisco entreprend de se venger. Il s’établit d’abord clandestinement dans la maison en passe d’être achevée puis, le propriétaire étant mort brusquement, il décide de l’occuper (ce qui est possible selon la loi mexicaine si aucun héritier ne la réclame). Il invite ses anciens compagnons de chantier à le rejoindre et à vivre dans la vaste bâtisse. Au début tout se passe bien dans cet îlot autogestionnaire. Et puis, des conflits apparaissent tandis que germe le virus de la trahison. Francisco lui-même va changer à un moment et pour des raisons qui demeurent en partie dans l’ombre.

Le film dégage une profonde amertume : si les patrons sont impitoyables, les ouvriers sont incapables de solidarité durable, ce qui handicape tout projet d’émancipation collective. David Zonana a réalisé avec talent et avec des comédiens non professionnels (à l’exception de celui qui joue le rôle de Francisco) une première œuvre sombre. Au-delà du pessimisme de l’auteur, le film incite à la réflexion sur les moyens de faire en sorte que ceux qui ne sont dans le capitalisme qu’une « main-d’œuvre » puissent se constituer en collectif capable de changer le monde.