Plutôt que de rouler les mécaniques sur les gaz de schiste et de valoriser le nucléaire, Ségolène Royal ferait mieux de s’inspirer du dernier rapport de l’Ademe (agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie)...
Ce rapport aurait dû être présenté au colloque sur « les énergies renouvelables dans la production d’électricité en France », les 14 et 15 avril prochains. Mais il a été repoussé !
Le rapport qui dérangeEn 120 pages, les experts de l’Ademe et de la direction générale de l’énergie et du climat (on peut difficilement faire plus officiel) imaginent comment la France pourrait vers 2050 satisfaire ses besoins énergétiques avec les seules énergies renouvelables. Selon eux, la France dispose d’un potentiel d’énergies renouvelables considérable. La production pourrait atteindre 1 268 TeraWatt heure (TWh), soit trois fois la demande d’électricité escomptée (422 TWh).L’étude a été réalisée pour chaque heure de l’année, pour chaque région, avec une modélisation sur toutes les filières de renouvelables, pilotables ou non (éolien terrestre, en mer, filières marines, photovoltaïque, hydraulique, géothermie, incinération d’ordures ménagères, cogénération au bois, méthanisation, solaire thermodynamique à concentration, centrales hydroélectriques à réservoirs). Le rapport accorde une grande place à l’éolien, s’appuyant notamment sur une nouvelle génération de machines adaptées à des régions où les vents sont plus faibles. Mais, anticipant les réticences face aux éoliennes, les auteurs ont aussi élaboré un scénario alternatif, où une plus faible proportion d’éolien terrestre et de photovoltaïque au sol est compensée par une importante part de panneaux solaires sur les toitures et par l’émergence de la filière houlomotrice (l’énergie des vagues), ainsi que beaucoup de stockage dont les enjeux ont été étudiés (batterie, station de transfert d’énergie par pompage…).
Sortir du nucléaire est possible...Au total, plusieurs scénarios ont été comparés : 100 % renouvelables, 95 %, 80 % et 40 %. Mais, chiffres à l’appui, l’étude précise et argumentée explique que le scénario « 100 % d’électricité provenant des renouvelables en 2050 » coûterait à peine plus cher aux consommateurs que le maintien du nucléaire à 50 % de la production électrique (seuil fixé pour 2025 par Hollande) : 119 euros/MWh contre 117 euros/MWh. Et encore le coût du démantèlement des centrales et de la gestion est largement sous-évalué. On comprend bien que le lobby du nucléaire, mais aussi le gouvernement Hollande-Valls-Royal, qui veulent garder une place privilégiée au nucléaire, n’ont pas intérêt à ce que le rapport soit divulgué, commenté et discuté. Mais ce rapport existe, a été diffusé sur Mediapart, et apporte la preuve qu’on peut se passer du nucléaire, technologie dangereuse, polluante et coûteuse.
Nécessaire et urgentAlors que l’EPR de Flamanville accumule les malfaçons – dernière en date, un défaut rédhibitoire dans le couvercle de la cuve –, que le risque lié à la chute d’un avion de ligne est maintenant avéré, c’est maintenant qu’il faut engager la sortie du nucléaire. Pour sa part, le NPA propose depuis 2010 un scénario de sortie du nucléaire en moins de 10 ans qui inclut la réduction des gaz à effet de serre. Le rapport de l’Ademe, dont les résultats ont été soumis à un comité scientifique d’experts nationaux et internationaux dans le domaine de l’énergie, apporte de l’eau au moulin de notre propre étude, par ailleurs bien plus ambitieuse en ce qu’elle remet en cause la consommation effrénée d’énergie et rend le pouvoir de décision aux salariéEs et aux usagerEs.Les pitoyables tentatives de dissimulation de la part du gouvernement sont vaines : de nouvelles perspectives militantes sont désormais ouvertes à toutes celles et ceux qui s’inscrivent dans un combat plus global pour changer de société.
CorrespondantEs de la commission nationale écologie