Publié le Jeudi 4 avril 2024 à 18h00.

Le glyphosate, le feuilleton sans fin

Rebondissement inattendu le 25 mars dans le dernier épisode de la saga du glyphosate, substance active herbicide à large spectre d’action sur les végétaux : le journal le Monde a obtenu enfin la publication d’un rapport vieux de huit ans et caché par l’Anses.

Ce rapport insistait sur l’insuffisance des tests et donc s’accommodait mal avec la ré-autorisation de l’herbicide en zones agricoles, forestières et non agricoles, au centre d’une campagne médiatique en 2017 et qui fut votée fin 2023. 

L’Anses enterre son rapport

L’Anses, agence sanitaire qui évalue les pesticides en France, a donc enterré un rapport sur le glyphosate en 2016, au motif qu’il aurait fait doublon avec un travail commencé par la Commission européenne sur la toxicité du glyphosate. Faux prétexte car l’Anses a continué à investiguer plusieurs mois après la création du groupe de travail européen. Un doute, peut être ? 

Quand le Monde a demandé la communication du rapport en 2021, l’Anses a refusé. Le journal a donc entamé une requête devant le tribunal administratif de Melun. L’Anses a fini par publier le rapport... la veille de l’audience ! Pourquoi tant de cachotteries ? 

Que dit le rapport de l’Anses ?

Les experts étaient formels : les tests faits par le groupe de travail de la Commission européenne ne sont pas suffisants. Unanimes, ils recommandaient d’utiliser des tests de mutation génique sur des cultures de cellules de mammifères et/ou un test dit « des comètes », in vivo, et pas seulement in vitro, comme la méthodologie européenne le préconise. Ne pas publier le résultat de leurs recherches a donc permis une évaluation moins exigeante de la ­génotoxicité des produits à base de glyphosate, comme l’a rappelé Pauline Cervan, toxicologue de Générations futures : « L’Anses s’appuie toujours sur les recommandations formulées en 2011 par les autorités européennes, alors que ses propres experts assuraient dès 2016 que ce n’était pas suffisant ». Ainsi, les produits comme Credit Xtreme et Gallup 360-K ont pu être autorisés à partir de 2017. 

De plus, l’Anses invoque des désaccords parmi les scientifiques au sujet d’une étude de chercheurEs portugais en raison d’incertitudes et biais méthodologiques. Cela ne peut justifier de cacher le rapport, puisqu’un scientifique de son groupe a bien constaté « un faisceau de résultats convaincants ­représent[ant] une véritable alerte sur un effet génotoxique induit par différentes formulations ».

Le glyphosate, une vraie série noire

Le cinéma a assez duré, le glyphosate doit être interdit ! La protection des populations doit s’appliquer. Aucune institution européenne ne pourra empêcher l’industrie chimique de dicter sa loi, car là n’est pas le but de cette Europe taillée sur mesure pour le capitalisme. Voilà pourquoi, entre autres raisons, il est urgent de bâtir une Europe sortie des traités établis et dictés par la loi du profit qui dessert les peuples et l’environnement. 

Commission nationale écologie