Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées à Mauzé-sur-le-Mignon dans les Deux-Sèvres. Face à un dispositif policier impressionnant (hélicoptère, contrôles des voitures, barrage policier sur le parcours, gaz lacrymogène), les manifestantEs, extrêmement bien préparéEs, ont su déjouer les embûches pour arriver jusqu'au lieu d’une méga-bassine déjà construite et à la vidanger dans le Mignon (une petite rivière).
Mission accomplie mais pas totalement, car nous n’avons pas pu parvenir au nouveau chantier méga-bassine gardé par la FNSEA, la Coordination rurale, la Chambre d’agriculture et des centaines de policiers. La lutte continue et, en pleine COP26, elle devient exemplaire ! Entre, d’une part, celles et ceux qui veulent sauver la planète et, d’autres part, un capitalisme égoïste au service des grandes exploitations productivistes qui ose parler d’écologie pour mieux massacrer nos ressources naturelles vitales.
Une lutte enracinée dans les terroirs qui s’amplifie tous les jours
« Il ne s’agit pas d’une opposition entre écolos et agriculteurs, mais d’une lutte de citoyens contre les agro-industries » (maïs d’exportation essentiellement), tient à préciser Joëlle Lallemand, autrefois chercheuse à l’Institut national de recherche agronomique, qui précise que « les études montrent que c’est bien l’irrigation qui assèche les rivières, pas les épisodes de sécheresse ». Cela fait des années que les habitantEs de la région le répètent. Toute cette zone du Poitou-Charentes avait, jusque dans les années 1990, un problème de trop d’eau et pas de sécheresse. Sécheresse qui va jusqu’à mettre en péril la conchyliculture (huîtres, moules, etc.) à quelques dizaines de kilomètres en bordure d’océan car cette activité a besoin d’eau douce non polluée.
Le NPA de toute la région « Charentes-Poitou » est vent debout avec les petits paysanEs et la population contre ces bassines, souvent construites illégalement avec des deniers publics, la bénédiction des gouvernements (via les préfets aux ordres) et contre les projets de méga-bassines en cours. Depuis deux ans, les manifestations se sont succédé dans les Deux-Sèvres (Mauzé, Niort), dans la Vienne (Saint-Sauvant), Charente (Longre) avec des participations chaque fois plus importantes grâce à la mobilisation de la Confédération paysanne, d’Attac, des Verts, de la LFI et du NPA (avec la participation de Philippe Poutou à deux reprises) mais aussi avec touTEs les amoureux et amoureuses de la nature organisés (LPO, FNE, Soulèvements de la terre, association de pêcheurs, etc.) et des milliers de non-organiséEs.
La guerre est vraiment déclarée
L’imposant cratère de ce qui s’appelle une « réserve de substitution » est déjà terminé sur la commune de Mauzé bien que le tribunal administratif de Poitiers ait rejeté, le 27 mai, neuf des seize bassines, arguant de leur taille excessive. Une première manifestation avait déjà eu lieu sur le site et avait permis la construction d’un vaste comité « Bassines non merci » qui convoquait celle du 6 novembre. La colère était palpable dans les rangs des manifestantEs (de 7 à 97 ans). La foule immense était bigarrée, les drapeaux de toutes les couleurs témoignaient de la diversité des organisations et associations présentes (en l’absence des PS, PCF, LO et organisations syndicales ouvrières). Les banderoles et pancartes éclataient sous le soleil d’automne : « No Bassaran », « Bassasine’s Creed », « Apocalypse d’eau », « Eau rage, eau désespoir ». Les cris de révolte fusèrent lorsque les orateurs du collectif « Bassines non merci » et de la « Conf » annoncèrent la présence nationale de la FNSEA sur la bassine grâce à un « pass » de la préfecture pour franchir les barrages policiers alors que nous avions été nombreux à être arrêtés et fouillés. Très vite, la riposte s’organisait avec la prise d’assaut du toit de la mairie renommée par une énorme banderole « Mauzé sur Bassines » tandis que les tracteurs de la « Conf » se mettaient en place pour ouvrir la manifestation.
La traversée de la petite ville se fit sans incident mais au bout de quelques centaines de mètres, le cortège ralentissait et quelques grenades lacrymogènes éclatèrent. Les forces policières avaient nassé la manifestation pour l’empêcher d’accéder au terrain des bassines. Après un petit quart d’heure d’hésitation, les organisateurEs locaux trouvèrent un plan bis. La manifestation quitta la route, traversa un immense champ de maïs déjà récolté et s’engagea résolument dans un bras de la rivière Mignon encore asséché en novembre. Tout un symbole ! Un deuxième bras présenta plus de difficultés avec de l’eau jusqu’aux mollets mais les 3/4 de la manif passèrent et nous pûmes rejoindre la bassine déjà en fonctionnement. Les tracteurs faisant un long détour pour nous rejoindre. Après quelques incidents avec la police, mais le gros des forces était avec la FNSEA sur le chantier de la future méga-bassine, cette bassine a donc été vidangée, la pompe neutralisée et les bâches plastiques découpées. Pour le chantier en cours éclairé et surveillé par un dispositif policier, dussions-nous nous transformer en taupes : « No Bassaran ! »
La présence du NPA très appréciée
Philippe Poutou ne pouvait pas être présent à Mauzé mais sa présence lors des précédents rassemblements avait suffisamment marqué les esprits pour que les petits paysans locaux nous présentent un presque-sosie pour faire la nique à la police si besoin. La vieille alliance ouvrière-paysanne presque ressuscitée !
Le NPA, seule organisation présente avec un tract, en a diffusé plus de 500. Nous y dénoncions les répressions en cours, développions nos mots d’ordre écosocialistes et insistions, sans nier l’importance de la bataille juridique en cours, sur la centralisation des luttes pour faire échouer les projets du gouvernement, des industriels du tourisme (Imagiland à Angoulême) et de l’agro-industrie (bassines sur les trois départements et ferme des 1200 taurillons en Vienne) et de tous les projets mortifères en cours dans le pays.