« On sait bien qu’il y a parfois des achats d’écrans plats plus importants au mois de septembre qu’à d’autres moments. » Décidément, Jean-Michel Blanquer n’en rate pas une. Questionné dimanche 29 août sur la proposition, venue d’une députée Modem, de verser l’allocation de rentrée scolaire sous forme de bons d’achat, le ministre de l’Éducation a affirmé qu’il s’agissait d’une « idée intéressante » et a ressorti les écrans plats de leurs cartons.
Une fois de plus, Blanquer n’innove pas, puisqu’il reprend à son compte l’idée, au moins aussi vieille que le capitalisme, selon laquelle les pauvres gèreraient mal leur argent et, pire encore, détourneraient les mécanismes de solidarité et d’aides de leur fonction officielle. Un discours réactionnaire bien connu, qui nous est régulièrement resservi à l’occasion de la rentrée scolaire ou au mois de décembre lors des versements des « primes de Noël » aux bénéficiaires des minima sociaux, accusés de les dépenser au PMU plutôt que d’offrir des cadeaux à leurs enfants.
Mais là où Blanquer franchit un cap dans le cynisme et le mépris, c’est qu’il s’exprime en tant que ministre d’un gouvernement qui n’a eu de cesse de faire la chasse aux pauvres, de raboter les allocations diverses (à commencer par l’APL), et qui entend mener à bien une désastreuse réforme de l’assurance chômage dont les conséquences sociales vont être tragiques. Un gouvernement qui, dans le même temps, a multiplié les cadeaux fiscaux aux plus riches et, à l’occasion de la crise du covid, ouvert grand les robinets et versé des dizaines de milliards d’euros aux entreprises, y compris et notamment les plus riches, sans exiger aucune contrepartie.
Il ne s’agit évidemment pas pour Blanquer et Cie de faire des économies, mais bien de jeter une fois de plus la suspicion sur les plus pauvres, au nom d’une idéologie ultralibérale dans laquelle l’individu serait l’unique responsable d’une situation personnelle de pauvreté, et non un système structurellement générateur d’inégalités. Au-delà, il s’agit de renforcer l’idée selon laquelle les plus pauvres devraient être strictement contrôlés et voir leurs libertés, y compris celle de gérer au mieux leur maigre budget, toujours plus rognées.
Cette nouvelle provocation donne, à sa façon, le ton de la rentrée. Et si nous ne sommes pas surpris tant le mépris social est une des marques de fabrique de la macronie, Blanquer nous renforce dans nos convictions : il va falloir, touTEs ensemble, que nous nous débarrassions de ces malfaisants, et nous n’attendrons pas 2022 pour nous faire entendre !