Publié le Mercredi 17 février 2010 à 11h26.

Chérioux, déterminés à gagner  !

Les personnels et les élèves du lycée Adolphe-Chérioux sont engagés dans un bras de fer avec le ministre de l’Éducation pour le doublement des postes de surveillants après l’agression d’un élève. Depuis le 2 février, lorsqu’un élève a été passé à tabac et blessé à l’arme blanche par une bande venue de l’extérieur, aucun cours n’a lieu au lycée Adolphe-Chérioux de Vitry-sur-Seine. Cette cité scolaire (de près de 40 ha et 1 500 élèves) dans une banlieue défavorisée illustre les politiques de réduction de postes dans l’Éducation nationale. Le nombre de surveillants y est passé de 20 à 11 en quelques années. Dès le 2 février à 13 heures, les enseignants invoquent leur droit de retrait, refusent de faire cours, se réunissent en AG et de façon unanime et dans une unité syndicale complète, décident de se rendre au rectorat le 2, puis les 3 et 4 février pour y exiger le doublement du nombre de surveillants.

Le recteur de l’Académie de Créteil leur propose deux postes de surveillants et six de médiateurs (emplois ultra précaires et non qualifiés). Bien entendu, personnels et élèves refusent, les médiateurs étant censés gérer les absences et régler des problèmes compliqués de lien entre les élèves en difficulté et leurs familles. Le rectorat devient menaçant, expliquant qu’à compter du 8 février, le retrait serait requalifié en grève (sûrement sur ordre du ministre), comme si le simple fait d’avoir reçu une délégation réglait les problèmes. Devant la détermination des personnels, des élèves et des parents, une délégation a été reçue au ministère le 9 février où Luc Chatel refait les mêmes propositions. Le 10 février, nouveau rassemblement, cette fois-ci devant l’Assemblée nationale : la délégation est reçue par les groupes PC, Verts et PS qui, lors des questions au gouvernement, interpellent Luc Chatel qui répond à côté voire pas du tout... sous les huées !

Durant toute la semaine du 8 au 13 février, la mobilisation ne faiblit pas et les « Chérioux » ouvrent la manifestation du 11, appelée par les établissements de Seine-Saint-Denis, le Snes-FSU, SUD et la CGT contre la réforme des lycées et les suppressions de postes. Plusieurs lycées voisins d’Ivry et Vitry débrayent aussi. Depuis, les personnels demandent un débat télévisé avec Luc Chatel : « Le ministre est en devoir de répondre à nos besoins humains urgents. On demande un débat télévisé avec le ministre pour qu’on lui explique que la situation de notre établissement exige ce doublement. » Il faut dire que le mouvement rencontre une véritable sympathie auprès de la population de Vitry, les tracts et pétitions qu’ils ont commencé à distribuer sur le marché ont reçu un écho très chaleureux et favorable. Ce mouvement est exemplaire à plusieurs titres : dans un contexte politique sécuritaire où chaque incident ou drame qui survient dans ou à la porte des établissements de banlieue est l’occasion de surenchères sur la nécessité de renforcer la police ou de la faire entrer dans les écoles, les personnels ont construit leur mobilisation autour de la défense et l’amélioration du service public. Ils démontrent ainsi que c’est la dégradation des services publics qui crée en bonne partie les problèmes d’insécurité dans nos banlieues et non le contraire. Le soutien important de la population qui leur dit de « tenir bon » est aussi remarquable dans ce contexte. Ce mouvement se construit dans l’unité autour de l’exigence de doubler le nombre de surveillants et le refus de la précarité et il tient malgré l’intransigeance gouvernementale. La mobilisation s’intègre dans la bagarre générale contre les suppressions de postes dans l’Éducation et la réforme Chatel. Vendredi 12, 90 personnes se sont retrouvées en AG pour continuer. L’enjeu sera de rebondir après les vacances scolaires (du 20 février au 8 mars). Cela ne peut dépendre des seuls « cher you » ; la mobilisation dans un certain nombre d’établissements de banlieue parisienne doit trouver des relais à partir du 8 mars quand toutes les académies auront repris. Ce sera alors aux fédérations syndicales de l’Éducation nationale de jouer leur rôle de coordination pour favoriser la convergence et aller vers un mouvement d’ensemble. Correspondants