Publié le Mercredi 29 septembre 2021 à 20h00.

Les écoles veulent des moyens pour fonctionner, pas des chefaillons pour les manager

Le 22 septembre dernier, une commission de l’Assemblée nationale adoptait la loi Rilhac, avant qu’elle soit débattue les 29 et 30 septembre.

Dans le texte de la loi Blanquer sur l’école de la confiance (2018), un article a participé grandement de la cristallisation du mécontentement : celui sur les « établissements publics des savoirs fondamentaux ». Pas aussi abouti que la loi Rilhac, il visait, par le regroupement d’écoles, à leur imposer un supérieur hiérarchique. L’idée était là mais sa mise en œuvre, sur le papier, semblait si périlleuse que, face à l’opposition principielle de refus d’un chef, cet article fut abandonné.

Pendant la crise sanitaire, les directeurs et directrices d’école se sont trouvés garants de la mise en place des protocoles sanitaires et ce qu’ils ont induit, sans moyens supplémentaires, de charge de travail en plus pour les directions.

Alors que l’année s’est ouverte avec les provocations sur les salaires et leurs prétendues « revalorisations » pour les plus jeunes dans le métier, la loi Rilhac apparaît pour la majorité des enseignantEs du premier degré pour ce qu’elle est vraiment : mettre dans chaque école un contremaître chargé d’imposer les décisions ministérielles et d’en faire les bilans aux inspecteurEs.

Refuser la destruction du collectif École

Un directeur ou une directrice d’école aujourd’hui est unE collègue déchargé partiellement ou totalement de sa classe pour assurer les tâches administratives quotidiennes et la mise en musique des cadres collectifs de discussions et de décisions que sont notamment les conseils des maîtres et des maîtresses. Mais les tâches administratives exponentielles, l’absence de temps et d’aide pour les prendre en charge, empêchent clairement aujourd’hui un directeur ou une directrice d’envisager assurer des moments pédagogiques avec les adjointEs.

En faisant passer la loi Rilhac, le gouvernement réussirait l’exploit de donner un champ d’autorité extrêmement étendu aux directions d’école tout en n’étant pas contraint par une modification statutaire.

Par la « délégation de compétences » et « l’autorité fonctionnelle », le directeur ou la directrice aurait le dernier mot sur le budget, le choix des outils pédagogiques, la répartition des classes mais aussi un avis à rendre sur les enseignantEs. Si l’expérimentation de Marseille venait à se généraliser, c’est même le directeur ou la directrice qui pourrait recruter directement son équipe. Avec, d’une part, des équipes qui seront dépossédées de leur liberté pédagogique, de la crédibilité de leur expertise d’enseignantEs et, d’autre part, une pression qui sera mise en haut-lieu, cette loi n’instaurera que division, concurrence et désagrégation du collectif qui fait encore la force des écoles.

La bataille qui s’engage n’en est qu’à son début et les revendications sont évidentes : il faut des postes encore et encore, du temps de décharge supplémentaire et de l’aide administrative apportée à celles et ceux qui assurent la direction... Mais il est aussi nécessaire de reprendre une discussion presque originelle sur qui décide au sein des écoles : jusqu’à ce jour, les écoles, et c’est bien cela l’os sur lequel se cassent les dents les ministres, ont fonctionné sans chef avec ce que cela laisse comme marge de contestation et de refus d’appliquer des réformes ou mesures nationales comme les évaluations.

Le combat contre les chefs ne fait que commencer : par le refus de la loi, par la lutte pour son abrogation une fois adoptée, et avec son application concrète contre laquelle doivent se jouer, massivement les résistances !