Publié le Samedi 22 mai 2010 à 12h33.

Lycée l’Estaque: discrimination à la formation

Un casier vierge, des papiers en règle et des tests urinaires pour entrer dans un bac professionnel public.Le lycée professionnel et technologique régional L’Estaque est un établissement situé dans l’un des quartiers les plus populaires de Marseille : le plus au nord des quartiers nord. Ce lycée d’insertion qui accueille des publics difficiles propose depuis 2006 un bac professionnel sécurité prévention qui prépare aux métiers de la sécurité : pompier, police, personnel pénitencier ou vigile. Durant les deux années de formation, les élèves font des stages chez les pompiers, dans la police, dans la police des airs et des frontières… Or, cette année, les rectorats des académies accueillant ce bac (et le CAP correspondant) ont donné l’autorisation de mettre en place des entretiens préalables avec les futurs élèves afin de donner une bonification de 8 000 points à ceux qui sauront satisfaire à quelques critères. Une partie des enseignants a immédiatement dénoncé une sélection à peine déguisée. En effet les critères sont scandaleux et discriminants. Dans le domaine des capacités physiques, sachant que l’on s’adresse à des enfants de 14 à 15 ans, il faut désormais mesurer au minimum 1,60 mètre, avoir une bonne vue, pouvoir faire des pompes (dix pour les garçons, cinq pour les filles). Ces critères ne sont pas les mêmes selon les académies. À cela s’ajoute un entretien sur les motivations. Quelles questions seront posées ? Comment mesure-t-on la motivation des candidats ? Comment mesure-t-on le dynamisme d’un candidat assis sur sa chaise ? Autant de questions posées par les élus CGT, à qui l’on a répondu : « ce sera la surprise ! » Comment lutter contre les possibles délits de faciès ? Les inspecteurs répondent : « Faites confiance à vos collègues ! » Or, dernière surprise, dans les jurys sont présents des policiers et des pompiers appelés « partenaires ». Enfin, si le candidat a répondu à toutes ces attentes, il doit encore constituer un dossier avec un extrait de casier vierge, avoir des papiers en règle… et à son entrée en première, il devra faire un test urinaire pour détection de substances illicites1. Finalement, une cinquantaine d’élèves sur 248 dossiers obtiennent les 8 000 points. La sélection a eu lieu ! Aucune possibilité d’appel, aucun recours possible. Ainsi apparaissent des filières dites « d’élite » dans un lycée qui, à la prochaine rentrée, verra son nombre d’heures d’enseignement diminué alors que le nombre d’élèves augmente. Emmanuelle Johsua1. Voir sur le site du lycée : www.lyc-estaque.ac-aix-marseille.fr