Lorsque les enseignantEs ont lâché les classes il y a maintenant quatre semaines pour les premierEs, il y a eu comme un pacte tacite : celles et ceux qui restent continuent le boulot, et on prend le relais en rentrant de vacances. Et c’est exactement ce qui est en train de se faire. Les enseignantEs de région parisienne auront battu le pavé une dernière fois le 18 avril, veille de leurs congés, quand celles et ceux de Nantes ou encore de Rouen, à peine rentrés, avaient déjà un calendrier de mobilisation long comme le bras : réunions d’information avec les parents, assemblées générales et manif du 1er Mai, avec la perspective de la grève Fonction publique du 9 mai.
Les (bons) réflexes reviennent
La bonne nouvelle c’est donc que l’ébullition de ce secteur qui en a étonné plus d’un ne semble pas retomber et qu’au contraire, une fois repris des forces, les réflexes construits avant les vacances reviennent immédiatement, en tout cas là où la lutte s’était significativement ancrée.
Et il y a fort à parier que les énièmes annonces de Blanquer, dans la foulées du discours de Macron, n’auront fait que convaincre qu’ils ne veulent rien d’autre que la destruction des services publics. Le « pas plus de 24 en CP et en CE1 », à moyens constants, c’est-à-dire sans réelle création de postes, aura mécaniquement pour effet l’augmentation des effectifs dans les autres classes. Et pas la peine de tourner autour du pot : touTEs les enseignantEs de France et de Navarre sont convaincus des bienfaits de classes à effectifs ne dépassant pas les 20. Mais ils et elles voient bien aussi qu’on les prend pour le dindon de la farce : sans profs en plus, on aère chez les petits mais on tasse chez les plus grands, sans aucune explication logique autre que l’affichage sur l’apprentissage de la lecture dont les méthodes d’assimilation seraient imposées si la réforme passe.
Aller jusqu’au bout
Au 20/20 pour toutes et tous et autres nombreux actes de résistance des enseignantEs du secondaire, Blanquer répond répression et sanctions administratives, ou bien passage en force avec la deuxième heure supplémentaire imposée en collège et lycée, qui a moins pour objet l’augmentation du salaire des profs que la réduction, encore, des postes.
À la veille d’une nouvelle grève, qui sera probablement de nouveau très suivie, et alors que, depuis près de deux mois, les méfaits des réformes Blanquer auront été exposés sur tous les tons, que les liens entre enseignantEs et parents mobilisés se sont solidement tissés, que des AG ont été massives et que bon nombre de cortèges d’établissements et d’écoles ont fait la démonstration de la détermination et du dynamisme qui animent les profs, il manque l’élément déterminant, celui qui fera pencher la balance du côté du retrait : ne pas reprendre le boulot, jusqu’à satisfaction.
C’est donc bien de cela, dès maintenant, qu’il faut débattre dans toutes les assemblés générales, en ayant conscience que chaque prise de position et action entamée à un endroit peut avoir un effet d’entraînement majeur ailleurs, comme cela fut le cas il y a deux mois quand les enseignantEs de Nantes sont entrés dans la danse et ont donné le signal à l’ensemble.
Mais cette fois-ci, le pas sera forcément plus grand : les professeurEs ont largement signifié leur opposition aux réformes Blanquer et, désormais, il s’agit d’aller jusqu’au bout pour obtenir le retrait de ces lois réactionnaires. Ainsi le 9, au côté de l’ensemble des fonctionnaires et des secteurs en lutte mobilisés, les profs témoigneront de leur colère. Mais le 10, il faudra continuer afin que le 13, jour du passage de la loi au Sénat, la balance penche dans le sens du service public d’éducation et pas des cadeaux supplémentaires au privé et à la sélection par le pognon !
Denise Sarraute