Publié le Samedi 17 avril 2010 à 13h42.

Violence à l’école : l’enfumage de Chatel

Alors que les enseignants, et en particulier ceux des lycées Chérioux à Vitry-sur-Seine et Apollinaire à Thiais (Val-de-Marne), tous deux concernés par des agressions en janvier et février, réclament plus de personnels formés, les annonces de Chatel ne sont que solutions sécuritaires, répression et poudre aux yeux. Solutions sécuritaires, avec la création de postes de « préfet des études » (comme chez les jésuites), se substituant au travail des conseillers d’éducation et des surveillants. Avec le renforcement des équipes mobiles de sécurité, de la vidéo-surveillance. Répression avec le placement des jeunes « violents » dans des « structures adaptées » dont on tait encore le nom... Un centre éducatif fermé ? Un bagne à Oléron ? Et avec la suppression des allocations familiales pour les parents « qui n’assumeraient pas leurs responsabilités ». Poudre aux yeux avec le « recrutement des équipes par les chefs d’établissement dans les collèges les plus difficiles ». Les profs qui accepteront d’y aller seront ceux qui n’auront pas le choix : des vacataires, des non-titulaires, des débutants, c’est-à-dire exactement la même situation qu’actuellement mais en plus précaire alors que toutes les études prouvent qu’il faudrait au contraire des équipes stables et cohérentes. Ou encore avec une formation des jeunes enseignants à la violence, alors que ce même gouvernement vient de supprimer la formation professionnelle des enseignants. L’enfumage autour du nouveau programme « clair » (collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite) pour les établissements jugés les plus difficiles, c’est-à-dire la création d’une nouvelle carte des difficultés, non plus basée comme les ZEP sur les difficultés sociales, mais sur la violence scolaire. Face à cette mascarade, il faut affirmer que la violence est d’abord une violence sociale, qui attaque les enfants, les adolescents et leurs parents : mal-logement, chômage des parents, difficultés sociales, précarité et horaires de travail incompatibles avec une vie familiale. Cette violence, qui s’exerce sur eux dès le plus jeune âge, les éduque à la violence. La répression n’est pas une solution. On ne peut pas faire fonctionner des établissements scolaires dans une terreur organisée, car l’échelle de la « violence » s’ajuste toujours à l’échelle de la répression. Plus celle-ci sera violente, plus elle formera des adolescents violents et résistants. La stabilité des équipes (et donc la titularisation de l’ensemble des personnels) est un enjeu décisif qui suppose sans doute de trouver des avantages réels à travailler dans les établissements problématiques et une véritable réflexion pédagogique pour changer la donne. Beaucoup de bonnes solutions ont été proposées par les acteurs de terrain, élèves, enseignants, mouvements pédagogiques. Mais dans un contexte où l’objectif est de faire baisser le nombre de fonctionnaires, aucune n’a été retenue... À tous les étages, l’école publique est en danger.Véronique Decker