Le problème premier de la direction n’est pas l’avenir de l’usine mais de savoir quand les salariéEs vont se remettre à travailler normalement. Cela fait en effet désormais plus d’un mois que les objectifs de production ne sont pas atteints : proches de rien pendant 3 semaines, autour de la moitié depuis.
Ce n’est pas le manque de pièces qui chagrine Ford. Ce serait plutôt cette sorte d’indiscipline dingue et inadmissible. Les dirigeants ne supportent pas ce qu’ils prennent pour un refus de travail. On n’a jamais vu une entreprise où des salariéEs étaient payéEs à ne rien faire. C’est immoral.
Pression sur les salariéEs
Alors cette direction « travaille » à mettre la pression, à « motiver » le personnel. Elle est aidée depuis peu par le syndicat des cadres qui se met clairement au service des dirigeants. De manière plus ou moins fine, des cadres plus ou moins zélés cherchent des solutions pour que tout le monde rentre dans le rang. C’est évidemment pour notre bien : travailler, c’est montrer à Ford qu’on reste professionnel, c’est pour éviter que Ford trouve des raisons de partir plus vite (!) c’est pour que Ford garde l’envie de trouver une solution (!), c’est enfin pour ne pas faire fuir d’éventuels repreneurs (!).
Logiquement, l’équipe CGT est accusée d’être responsable de la situation, des délégués sont attaqués personnellement (on va faire une réunion CHSCT extraordinaire). La CGT est le seul syndicat à encourager à ne pas travailler ce qui serait « suicidaire ». C’est vrai que nous sommes un peu seuls à défendre cette idée qu’on a le droit de ne pas avoir envie de travailler dans ces conditions, que ce n’est pas parce qu’on ne travaille pas qu’on s’embête : on peut discuter, préparer des actions, on peut « travailler » à construire la mobilisation.
Pour nous remettre au travail, c’est simple, il suffit que Ford s’engage à apporter de l’activité pour les années qui viennent et à maintenir les emplois. Voilà l’ambiance. Même si les actions de grève ou manifestation sont faibles, au moins ça résiste. Et c’est dans cette ambiance que nous préparons la journée de débat-concert en soutien à la mobilisation, samedi 21 avril. Il y a les moments difficiles et les moments enthousiasmants de la bataille. C’est comme on peut, avec les moyens du bord, mais on ne lâche pas.
Philippe Poutou