Publié le Mardi 23 février 2016 à 10h30.

Castmetal Colombier-Fontaine (25) : Victoire pour les 4 licenciés

Première victoire pour nos camarades de Castmetal licenciés en mai 2015 à la suite de la création d’un syndicat CGT. Le tribunal d’appel de Besançon vient de demander la réintégration des 4 ouvriers licenciés, le 5e mandaté par la CGT avait vu son licenciement refusé par l’inspection du travail.

Il n’est pas inutile de rappeler les faits dignes d’un roman de Zola. Castmetal (fonderie) est une filiale de la multinationale Safe Metal, qui emploie environ 200 travailleurs à Colombier-Fontaine, dont une cinquantaine en intérim.

Des conditions de travail dignes du Moyen Âge

« On travaille dans la chaleur, la poussière et le bruit, avec des machines vétustes, sans parler des salaires ridicules bien que nous travaillons de tournée », dit Fouat. Et pourtant pendant des années, malgré de nombreux accidents du travail, rien ne vient perturber la bonne marche de l’entreprise.

Il faut dire que le patron très paternaliste a su imposer son emprise sur les salariés, d’abord en n'employant en production que des travailleurs immigrés, en majorité turcs et maghrébins. Ensuite en ne faisant rien pour favoriser leur intégration, ne serait-ce que par la langue : la plupart des travailleurs turcs ne parlent pas français au bout de 12, 15, 17 ans d’ancienneté. « C’est pour ça qu’on les a embauchés, disent les épouses de ces ouvriers. Ils sont dociles. Mais avec le temps, ils commencent à comprendre et à dire ce qui ne va pas à l’usine. C’est ça qui ne plaît pas au patron. » 

M. Padraude, le patron, a aussi joué sur la division entre administratifs et ouvriers. Les cadres de la CFDT, seul syndicat représenté, sont tous des employés des bureaux qui vivent en parfaite harmonie avec la direction…

Les choses changent quand il y a deux ans, toute une partie de la hiérarchie a été renouvelée : chef d’atelier, chef du personnel, etc. Harcèlements et injustices se multiplient, et les conditions de travail se dégradent de plus en plus. « Il faut assumer deux postes au lieu d’un… le chef est toujours derrière nous, d’où un stress continuel, une multiplication des accidents du travail… », se plaignent les fondeurs.

La CFDT fait la sourde oreille aux plaintes de ses syndiqués ouvrier. « Il n’y a pas de vie syndicale, on n’est là que pour payer nos timbres ». Une quarantaine d’ouvriers décident alors de quitter la CFDT pour créer la CGT. Les statuts sont déposés en décembre 2014.

La direction voit rouge

Pour elle, le syndicat CGT est une menace insupportable, et elle fomente alors un plan machiavélique. Elle achète carrément les deux travailleurs les plus en vue, ceux-là mêmes qui sont en contact avec l’UL CGT. Et en avril 2015, l’un des deux « chouchou s » de la direction provoque ses camarades nouvellement engagés dans la CGT. Contre le souhait de toute la hiérarchie, l’altercation demeure verbale, sans coup ! Cela suffit pourtant pour que la direction monte en épingle cette affaire et décide d’engager une procédure de licenciement contre 5 ouvriers, juste un mois avant les élections professionnelles...

Or deux des ouvriers n’étaient pas présents lors des faits, et l’un absent de l’usine car en accident du travail. Jusqu’à présent, ces ouvriers étaient considérés comme modèles : aucun avertissement, aucun congé maladie, aucune absence... Ce à quoi ne s’attendait pas M. Pradaude, c’est que le jour de l’entretien préalable au licenciement, le 20 avril 2015, la quarantaine de syndiqués CGT se mettent en grève en solidarité avec leurs 5 camarades. Un conflit qui s’engage pour 5 semaines, une des plus longues grèves de ces dernières années sur la région de Montbéliard. 

Cinq semaines de grève

C’est les vacances scolaires dans l’académie de Besançon et les femmes et les enfants des grévistes vont être très présents devant les portes de l’usine située à l’écart de l’agglomération. Ainsi les épouses des 5 licenciés vont jouer un rôle déterminant dans ce conflit, d’abord parce qu’elles parlent bien français et parce que, révoltées par l’injustice subie par leurs maris, elles vont être d’un grand secours pour le moral.

La production est perturbée mais ça ne fait pas fléchir le patron. Et au bout de 5 semaines, les grévistes sont obligés financièrement de reprendre le travail, le cœur lourd, 5 camarades sur la touche. Heureusement l’inspecteur du travail refuse le licenciement de l’un d’eux.

Les élections professionnelles ont lieu en juin, et la CGT y fait 35,41 %. De quoi faire pâlir M. Pradaude ! 

Avec l’aide de l’UL CGT de Montbéliard, les 4 licenciés engagent alors une procédure aux prud’hommes en référé. En novembre 2015, ils sont déboutés, le président se pliant aux arguments fallacieux de l’avocat de Castmetal, à savoir qu’il ne s’agit pas de répression syndicale mais de fautes graves puisqu’il n’y a pas de preuve qu’ils appartenaient à la CGT... Avec leur avocat, maître Benachour, nos 4 camarades ont donc décidé de faire appel, et la cour d’appel de Besançon leur donne donc aujourd’hui raison. Le patron a 15 jours pour les réintégrer, mais il paraît qu’il va aller en cassation.

Les 4 licenciés doivent reprendre le travail ce lundi 22 février : ils appréhendent un peu, mais ils vont rentrer la tête haute. Gageons que leur lutte redonnera courage à tous les salariéEs pour se battre contre toute injustice.En attendant nous savourons avec eux cette victoire et nous la fêterons ensemble le 12 mars à la salle des fêtes de Montenois.

CorrespondantEs