Fin décembre 2014, le personnel navigant d’EasyJet s’est fait remarquer par deux grèves successives lancées les 24-25 décembre et 31 décembre-1er janvier.
EasyJet est une compagnie aérienne européenne connue pour être, avec Ryanair, la championne européenne du modèle « low cost ». Elle utilise toutes les ficelles mises en œuvre depuis 1995 par son fondateur, un armateur chypriote qui a immatriculé la compagnie à Jersey, paradis fiscal de la couronne britannique...En 2014, EasyJet a réalisé un bénéfice opérationnel record de 743 millions d’euros, en croissance de 21 %. Même si le chiffre d’affaires et le niveau d’activité de cette compagnie sont de 5 à 6 fois inférieurs à ceux des compagnies « majors » (Lufthansa, Air France, British Airways), celle-ci sert depuis de nombreuses années de modèle de réussite capitaliste dans le secteur pour les investisseurs et actionnaires qui mènent les attaques patronales dans tout le secteur.La règle est donc évidemment de mettre en œuvre le maximum de flexibilité et de baisser au maximum la masse salariale. Dès le départ, EasyJet a externalisé toutes les opérations de maintenance, d’assistance au sol et d’enregistrement. Mais, même en ce qui concerne le personnel navigant (hôtesses, stewards et pilotes), la politique est la précarité maximale des conditions de travail. Les plannings de vol peuvent être déstabilisés en permanence, empêchant toute organisation de sa vie personnelle. Ainsi, les navigantEs peuvent avoir 20 modifications de plannings sur le même mois. En effet, la compagnie se vante d’arriver à la flexibilité maximale pour réaliser le maximum de vols avec le minimum de personnel : demi-tour réalisé dans un minimum de temps, nettoyage de la cabine réalisé par le personnel de bord, consignes délivrées sur des téléphones portables personnels, etc. la liste est longue.
Triste modèle...Si la coupe est pleine pour les personnels, c’est bien évidemment parce que les bénéfices réalisés vont aux actionnaires et aux grands dirigeants, ne laissant que des miettes pour les salariéEs. Même si les syndicats de l’entreprise ont accepté depuis longtemps que « ce retour sur productivité » se fasse sous forme d’actions et non pas avec de réelles augmentations de salaires, la direction a même eu cette année l’indécence de baisser de 25 % les actions données en remerciement. Cela alors que les dividendes versés aux actionnaires et aux dirigeants ont augmenté de 35 % et que le salaire de la PDG Carolyn Mc Call est passé de 6,4 à 7 millions de livres (8,9 millions d’euros)...Cela a déclenché la colère des salariés basés en France (1 000 sur 9 600) : une grève contre ce mépris et pour obtenir un accord sur les plannings garantissant moins de déstabilisation. Inutile de dire qu’à la suite de l’annonce le 11 décembre de cette grève, il n’y a eu aucune négociation... Par contre, la direction a offert plus de 100 livres au personnel navigant commercial basé hors de France pour venir casser la grève de leur collègues, une grève ultra-majoritaire. EasyJet a dû annuler des dizaines de vols à partir des escales françaises.Les dirigeants des compagnies aériennes françaises (Air France, Corsair, Air Austral) prennent comme modèle EasyJet et Ryanair et cherchent à appliquer contre les salariéEs des recettes équivalentes. Même l’ancien secrétaire d’État socialiste aux Transports, Cuvillier, avait chaudement accueilli, il y a quelques mois, la PDG d’EasyJet, la félicitant du développement de sa compagnie en France.Le triste exemple de conditions imposées aujourd’hui aux salariéEs d’EasyJet montre que les capitalistes, dans le secteur aérien comme ailleurs, n’ont d’autres limites que celles que les travailleurs sont capables de dresser contre eux.
Léon Crémieux