Mauvaise nouvelle pour Hollande : le nombre de chômeurs en catégorie A (demandeurs d’emploi sans aucune activité et tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi) a augmenté en août de 1,4 %, soit plus de 50 000 chômeurs supplémentaires dans cette catégorie.
Cela fait 3,5 millions de personnes. En ajoutant les autres catégories, on arrive à 6,2 millions de demandeurs d’emploi en août. Des chiffres qui font d’autant plus désordre qu’ils arrivent en même temps que la multiplication des annonces de plans « sociaux » et de suppressions d’emplois.
Jeu de massacre social
Tous les secteurs sont touchés : l’industrie (Alstom, General Electric, Latécoère, Vallourec, STMicroelectronics, Airbus), l’informatique (Hitachi, Intel, IBM), les banques (HSBC, Société générale, CCI), DCNS, Engie, SFR, etc. Une liste non exhaustive de dizaines de milliers de suppressions d’emplois « directs », dont l’impact social doit être multiplié par trois si l’on prend en compte les suppressions en cascade chez les sous-traitants, et dans toute l’économie locale.
Pour spectaculaires et médiatisées qu’elles soient, ces suppressions d’emplois viennent s’ajouter à celles des PME et aux plans sociaux invisibles que sont les ruptures conventionnelles (plus de 30 000 par mois). En 1994, 58 % des 840 000 licenciements étaient liés à des motifs économiques. Aujourd’hui, les licenciements pour motif personnel (faute, insuffisance professionnelle ou inaptitude) sont à peu près trois fois plus nombreux que les licenciements pour motif économique...
De fait, la bourgeoisie est à l’initiative dans un permanent et gigantesque Monopoly industriel et économique. La plupart des grands groupes réalisent aujourd’hui une majorité de leurs productions et bénéfices dans les pays « émergents », là où les « coûts » salariaux sont les plus faibles. En Europe de l’Est, le différentiel moyen est de 50 % avec les pays capitalistes « avancés », et il est plus important en Chine, et bien plus encore au Bangladesh... Les avantages des pays capitalistes « avancés » en termes d’infrastructures, d’appareil de formation et d’importance des marchés, expliquent en grande partie le maintien de productions. Les coûts de circulation des marchandises et les pressions sociales (mobilisations des salariéEs) et dans certains cas politiques (pression des gouvernements) viennent en complément.
Gesticulations
Les réponses politiques de droite comme de la gauche institutionnelle sont semblables : face à la concurrence mondialisée, pas d’autre solution que d’aider les entreprises, c’est-à-dire les capitalistes, à flexibiliser l’emploi, baisser les « charges », préserver l’emploi en France, l’emploi des « Français »...
Le cas d’Alstom est emblématique. Face à l’annonce du PDG de quasi-fermeture du site de Belfort, tous proposent de remplir le carnet de commandes « françaises », oubliant ou faisant mine d’oublier que, comme dans tout groupe international, les choix de sites sont fait en fonction des profits, et non des emplois... De plus, le cas d’Alstom ne peut être traité isolément de celui de l’ensemble des éléments de la filière ferroviaire actuellement livrée au néolibéralisme.
Tout au plus s’agit-il de gesticulations dans le cadre de la campagne présidentielle, avec l’éventualité pour Hollande d’apparaître, même provisoirement, comme le sauveur d’Alstom...
Construire la riposte
Loin de ces postures, des mesures radicales dans lesquelles les premierEs concernéEs, les salariéEs, se reconnaissent, des mesures qui leur donne envie de se mobiliser, s’imposent. Au cœur, l’interdiction des licenciements et la réduction massive du temps de travail, sans baisse de salaire.
C’est la dictature patronale, au cœur de la propriété capitaliste qui, par la recherche du profit, la mise en concurrence, provoque les licenciements. C’est pourquoi nous défendons l’idée d’exproprier les entreprises qui licencient. La production et son organisation doivent être confiées aux salariéEs afin de satisfaire les besoins sociaux, sous contrôle de la population, des usagerEs. C’est une évidence pour le rail et le transport urbain.
Mais de telles mesures ne peuvent être mises en œuvre qu’avec un rapport de forces favorable aux exploitéEs. Le premier obstacle est donc un certain fatalisme, de la résignation. Et il n’est pas sûr que l’agitation politicienne autour d’Alstom favorise la mobilisation.
La manifestation de 7 000 personnes, samedi 24 septembre à Belfort, a montré une volonté de résistance. Dans les semaines qui viennent, celles et ceux qui sont concernés par des licenciements doivent se rencontrer, s’épauler, préparer ensemble des initiatives qui donnent confiance. La colère accumulée et affirmée lors de la mobilisation contre la loi travail, celle qui monte contre la répression, peuvent se renforcer et permettre la construction de mobilisations qui commencent à changer le rapport de forces. Avec une première étape à l’occasion du rassemblement de soutien aux Goodyear les 19 et 20 octobre à Amiens.
Robert Pelletier