Après la valse des ministres qui tentent depuis six semaines de faire croire que l’incendie Lubrizol n’est pas plus dangereux qu’un simple feu de poubelle, ni pour la nature ni pour les riverainEs, le président des riches a profité de son séjour luxueux à Honfleur pour tenter le coup du bain de foule à Rouen jeudi 31 octobre.
Il faut dire que Macron avait mis toutes les chances de son côté : visite annoncée à peine deux heures avant, tour des bistrots branchés du centre-ville bourgeois et présence d’un comité de soutien LREM. L’intervention de la police scindant la manifestation appelée dans l’urgence par la CGT, Solidaires et d’autres organisations du collectif unitaire, puis la nasse illégale de la tête de manif pendant plus de deux heures n’auront cependant pas permis à Macron de passer un moment si tranquille que ça. Sifflets et slogans « Macron démission » lors de sa sortie de la mairie, interpellations publiques d’habitantEs en colère, expressions de craintes pour la santé… Le bain de foule a failli tourner à un bain de goudrons et de plumes !
Plus jamais ça !
Sur le fond, la visite de Macron répondait à plusieurs objectifs très éloignés de la protection des riverainEs et des travailleurEs vis-à-vis de la gestion du risque industriel par les capitalistes. Alors qu’émerge une prise de conscience collective de la population sur les risques différés, pour la santé, de l’incendie, qui s’ajoutent à une forte pollution industrielle, certainEs auraient aimé que le président de la République annonce à minima un renforcement des contrôles de l’État sur les sites Seveso dans l’optique d’un « plus jamais ça », et qu’il reconnaisse au moins les carences du préfet dans le contrôle de Lubrizol comme dans la gestion de crise. Que nenni ! Dans la droite ligne des ministres qui l’ont précédé, Macron a assené qu’il n’y avait eu aucune défaillance de l’État, position somme toute logique dès lors que rien n’est dangereux dans le panache de fumée. Dans ces conditions, on se demande même si la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) ne fait pas un excès de zèle en annonçant désormais des procès-verbaux à l’encontre de Lubrizol et de son sous-traitant Normandie Logistique ! Le vrai problème de Macron et du maire de Rouen (ex-PS et rallié à LREM) est de redonner de l’attractivité touristique à la ville... d’où l’annonce d’un grand sommet international en 2020. Sans doute ont-ils pensé à inviter Donald Trump ou Warren Buffet pour une conférence sur la pollution bio !
Plaisanterie mise à part, le crime industriel du 26 septembre, dont les conséquences immédiates auraient pu être dramatiques, a ouvert un débat public sur le risque industriel. Ainsi, sur la zone du Havre, ce sont les représentantEs CGT des entreprises Seveso, soutenus par des associations de riverainEs, qui ont envahi mercredi dernier la commission de suivi de sites Seveso pour exiger un renforcement des contrôles des industriels et la fin de l’impunité contre la délinquance patronale. Mais pour la sous-préfète qui présidait la réunion, l’heure n’est pour le moment qu’à la « discussion » avec les industriels. Les patrons des multinationales qui tuent et qui polluent peuvent encore dormir tranquilles… Mais attention, car on entend la révolte qui gronde ! Prochaine étape de la mobilisation : de nouvelles manifestations le 26 novembre.
Gérald Le Corre