Publié le Vendredi 28 octobre 2011 à 09h25.

M-real : ils ont osé fermer, il faut les réquisitionner

L’usine peut et doit vivre avec tous ses emplois.Après des semaines de négociations avec d’éventuels repreneur, le PDG de M-Real a soudain rompu les discussions, refusant de vendre. Les salariés remettent en cause sa légitimité.

Le mardi 18, quand les salariéEs ont appris en AG que le PDG finlandais avait décidé d’interrompre les négociations avec les candidats à la reprise et de fermer, la papeterie d’Alizay (27) s’est arrêtée immédiatement. On ne mesure pas toujours à quel point l’électronique peut être sensible à l’air du temps… et l’atmosphère était en effet bien lourde : alors que les deux candidats à la reprise avaient quand même fini par accepter les deux clauses inventées par M-real pour les dissuader (maintien des emplois et couverture des éventuelles pertes du site pendant 24 mois), ils n’ont plus trouvé que le prétexte d’un désaccord sur le prix de reprise…

Dans ces conditions, les vieux réflexes jouent aussitôt : braseros, barnum, musique, et comme l’usine marche en continu, on passe son temps de faction au piquet de grève. Le soir même, la réunion du « collectif pour le maintien et le développement de l’emploi » se tient sous la tente, en présence d’une cinquantaine de travailleurs. Au début, ça écoute avec une curiosité mêlée de distance cette étrange assemblée d’animateurs syndicaux, de maires et d’élus, de représentants du NPA, du Nouveau Centre, du PS, du PCF, d’EÉLV, manifestement habitués à se retrouver chaque semaine. Puis des réflexions fusent, hésitantes, et certains se lancent, proposent une action et défendent leur point de vue : on a vraiment passé un cap ! On se met d’accord sur des initiatives : péage gratuit à 200 un matin, avec, c’est pas banal, une ramette A4 emportée pour un tract accepté. Puis lundi dernier, montée à cinq cars à Paris pour appuyer la réunion de « médiation » avec le Thaïlandais « AA » que le PDG a finalement acceptée. Un résultat à la fois de la pression des travailleurs, de l’ampleur nationale qu’a prise cette affaire et de l’enjeu pour l’avenir tant de l’élu régional et ministre de l’Agriculture, Le Maire, que de plusieurs notables du PS.

Mais lundi, retournement brutal : plus question de vendre à quiconque, fermeture point final. Comme si Metsaliitto, société mère de M-real, avait donné de nouvelles consignes. Le coup est rude et bien des angoisses s’expriment dans les petits groupes de discussion spontanée. Mais au retour devant l’usine, l’AG de 350 personnes décide de maintenir le blocage, de continuer l’action pour les forcer à vendre, de tenir une nouvelle AG mardi midi.

Au moment même où les représentants de l'État larmoyaient à la radio sur leur incapacité à forcer un groupe privé à vendre, le secrétaire CGT du CE Thierry Philippot martelait : « M-real n'a plus aucune légitimité, il ne veulent pas vendre, eh bien, l'usine elle est à nous, notre droit d’existence doit passer avant leur droit de propriété, ils doivent être réquisitionnés s’il le faut pour vendre aux intéressés, et si nécessaire nous prendrons directement contact avec eux ». Les applaudissements fusent, et il n’est pas habituel ici que l'approbation prenne cette forme.

Correspondants (lundi 20h)

Dernière minute : Les salariés d’Alizay, avec leurs organisations syndicales (CGT et CFE CGC), ont décidé de « faire tourner l’usine » et de mettre en route la production de papier le samedi 29 octobre ! Journées "portes ouvertes" sur l'entreprise à partir de 9 heures.