Depuis début juillet, les 366 ouvriers de New Fabris, constructeur de pièces automobile pour Renault et PSA, menacent de faire sauter l'usine s'ils n'obtiennent pas une prime de licenciement de 30 000 euros chacun.
Les ouvriers de New Fabris ont accepté, au cours d'une assemblée générale, lundi 20 juillet, de retirer les bonbonnes de gaz, placées devant l'usine de Châtellerault (Vienne). C'était un préalable imposé par Christian Estrosi, le ministre de l'Industrie, qui refusait toute rencontre « sous la menace », de peur que d'autres salariés dans la même situation suivent cet exemple. Les New Fabris n'ont pourtant pas abandonné leurs revendications et ce rendez-vous prévu mercredi 22 juillet a pour seul objectif d'obtenir que le gouvernement fasse pression sur Renault et PSA, afin que chacun des deux donneurs d'ordre leur versent une prime de départ de 15 000 euros par personne. Le résultat de cette rencontre sera déterminant pour la suite des événements, et « si à l'issue de la réunion au ministère, il n'y a rien de concret concernant les primes, une demi-heure après, les bouteilles seront sur les toits », déclarait le délégué CGT, Guy Eyermann.
Ils ont par ailleurs appelé les boites en lutte de l'automobile à prendre contact avec eux.
Depuis début juillet, l'incandescence de la lutte sociale, la révolte désespérée des 366 ouvriers de New Fabris font la une des médias et alimentent le feuilleton estival et dramatique de l'impasse économique dangereuse dans laquelle les salariés sont précipités. Les rôles sont parfaitement distribués : ouvriers et personnels méprisés par l'actionnariat et le gouvernement, appareils de directions syndicales nationales semblant inaudibles, émotion et désespoir, nouvelle étape dans la radicalisation avec la menace maintenue de détruire l'usine au 31 juillet. Et après ?
Il manque néanmoins deux acteurs principaux à ce feuilleton châtelleraudais : le débat politique et la solidarité de la convergence des luttes. Pourquoi des cordons industriels de convergence, regroupant l'ensemble des constructeurs, sous-traitants et équipementiers automobiles, en lutte au niveau national, n'ont-ils pas déjà été organisés ?
Pourquoi le groupe Renault oppose-t-il une grossière fin de non-recevoir aux Fabris, ne proposant que 3 500 euros de prime par personne, mais propose en Bretagne de reprendre SBFM (fonderie du groupe ZEN, comme Fabris d'ailleurs), sans perte d'emplois ?
La pauvreté du débat politique sur la compréhension de cette crise et l'absence de propositions concrètes sur le Châtelleraudais soulignent l'opportunisme inutile des décideurs politiques de cette région.
La réalité immédiate pour ces ouvriers et employés est le Pôle emploi - autre nom de la fourrière pour humains - et une période de chômage irrémédiable, longue, difficile, qui exigera des sacrifices douloureux.
Châtellerault sait très bien que son bassin d'emploi est condamné. Dépasser les moments de mobilisations initiaux pour arriver à un projet durable demanderait un réel débat social, politique, démocratique, environnemental avec, bien sûr, la participation, la consultation et le respect des choix de la population. Un véritable projet ancré dans le concret que la population pourrait construire et s'approprier.
Guy Besse