Il n’aura fallu que quelques heures à la Première ministre, Élisabeth Borne, pour approuver, lors d’un déplacement improvisé à l’hôpital de Pontoise, le « rapport flash » sur les urgences. Il n’est, à vrai dire, pas étonnant que les 41 mesures bricolées à la hâte par la Macronie pour essayer de passer l’été, reçoivent l’accord immédiat... de la Macronie.
Au lendemain de l’élection présidentielle, Macron et son gouvernement avaient fait semblant de s’apercevoir qu’il y avait comme un problème à l’hôpital public. En particulier aux urgences. Pour gagner du temps, pendant les législatives, ils avaient nommé une mission « flash » sur les urgences, présidée par le docteur François Braun, président de « Samu-Urgences France », mais aussi principal conseiller santé du président pendant sa campagne électorale. Il a d’ailleurs été nommé, dans la foulée, ministre de la Santé, en remplacement de Brigitte Bourguignon battue aux législatives.
Un état des lieux catastrophique
D’abord l’état des lieux. C’est la catastrophe ! Le rapport lui-même signale 133 services qui connaissent « de graves problèmes de fonctionnement », dont 11 CHU (centres hospitaliers universitaires) et CHR (centres hospitaliers régionaux),
Des milliers de soignantEs démissionnent, se mettent en disponibilité ou sont en arrêt maladie. Les jeunes soignantEs qui sortent de formation ne veulent pas aller travailler à l’hôpital : leurs stages ont été édifiants. Cela touche tous les services hospitaliers. Mais ce sont les urgences, tout naturellement, qui sont le symbole de l’implosion du système de santé publique.
Des dizaines de services d’urgences ferment en ce moment, la nuit en particulier. Les conséquences sont des heures, voire des jours d’attente pour les patientEs avec comme corollaire ce qui est pudiquement appelé « des pertes de chances ». Il y a de moins en moins de médecins de garde, les déserts médicaux sont de plus en plus nombreux.
Les soignantEs qui sont confrontés à cette souffrance craquent en nombre et se protègent en arrêtant de travailler dans ces services qu’ils et elles ont tant investi.
Pour des raisons budgétaires, depuis des décennies, la formation de soignantEs n’a pas été prévue, il n’y a plus de remplaçantEs. Les services techniques et logistiques, de plus en plus souvent confiés au privé, se dégradent eux aussi.
17 000 lits ont été supprimés par Macron depuis le début de la pandémie, s’ajoutant aux 100 000 lits supprimés en 20 ans.
La chute des dominos a commencé, le système de santé publique est en situation d’effondrement. Il commence à y avoir des mortEs évitables parmi les patientEs… et parmi le personnel !
Des propositions anti-service public
Que propose donc le rapport pour éviter, si possible, le naufrage total ?
La fin de l’accueil sans condition aux urgences ; la régulation de l’accès aux urgences de jour et de nuit. C’est-à-dire le tri des malades et la réorientation des cas jugés – par téléphone – les moins graves... vers une médecine de ville défaillante. Le but du gouvernement est une réduction de 20 à 30 % des urgences. Sachant que, déjà, les services de régulation explosent. La solution pour le bon docteur Braun est simple : pour ne plus avoir de fièvre il faut casser le thermomètre !
En outre, le rapport demande de renforcer les consultations en vidéo, en maintenant leur remboursement à 100 % ou encore en déployant des unités mobiles envoyées à la demande du Samu, sans médecins, avec des objets connectés pour réaliser une téléconsultation avec un médecin libéral.
Le rapport préconise aussi de payer 100 euros de l’heure les généralistes acceptant de faire de la régulation, et un supplément de 15 euros par acte aux médecins recevant un malade hors patientèle – à la demande du Samu ou du service d’accès aux soins (SAS), sorte d’urgence de ville.
Le rapport parle également d’une revalorisation des heures supplémentaires effectuées par les soignantEs, la nuit et le week-end.
Soit un rapport est des propositions à l’image de Macron et sa clique. Creux, tape-à-l’œil, vide et surtout toujours dans la même ligne politique : celle de la destruction du service public.
Une solution, la lutte et l’action de la population et des soignantEs
Il n’y a rien sur la formation des personnels, sur la réouverture des lits, des services et des hôpitaux de proximité. Rien sur les nécessaires embauches des milliers de soignantEs et des autres emplois indispensables. Mais tout pour dissuader la population de se faire soigner ; car que se passera-t-il lorsque l’on dira à quelqu’un se présentant aux urgences que son cas ne nécessite pas de soins immédiats ? Quelles réponses pour les angoisses, les gens ne parlant pas français, les personnes seules et/ou âgées ? Les pauvres ne pouvant pas avancer de frais médicaux ?...
Les 41 mesures approuvées par Élisabeth Borne n’ont rien d’un plan d’urgence, même provisoire, pour faire face à la situation pendant l’été. Il n’y a rien à attendre des fossoyeurs comme Macron, et de ses exécutants Borne et Braun.
La seule issue à cette situation mortifère est la lutte et l’action de la population et des soignantEs. Déjà, plusieurs services d’urgences sont en grève. Mais cela ne suffira pas. Il faut une action massive et coordonnée sur tout le territoire avec les populations. Des comités de défense de la santé publique voient le jour, en lien avec les syndicats à plusieurs endroits. Ils pourraient avoir comme perspective, comme ce fut le cas en Grèce avec les dispensaires autogérés, la prise en main de la santé par la population elle-même, alliée aux professionnelEs.
Sans attendre, c’est à cette remobilisation que forces syndicales, associatives et politiques doivent consacrer leurs forces.